par H. Rossier
Table des matières :
Vous connaissez, chers amis, les circonstances extérieures qui
ont donné lieu à cette épître. L’apôtre avait écrit d’Éphèse une première
lettre aux Corinthiens, après avoir appris le désordre qui régnait parmi eux et
auquel son coeur était d’autant plus sensible, qu’ils étaient tous ses enfants
dans la foi. L’Esprit de Dieu s’est servi de ces circonstances pour instruire
tous les chrétiens sur l’ordre qui
convient à la maison de Dieu.
En effet, pour connaître l’organisation de
l’Assemblée et nous y conformer, nous n’avons qu’à lire la première épître aux
Corinthiens. Après leur avoir adressé sa lettre, l’apôtre avait envoyé Tite
vers eux pour s’informer de leur état. Une grande porte était ouverte à son
activité dans la Troade, mais, dans son inquiétude, il avait abandonné cette
oeuvre pour se rendre en Macédoine à la rencontre de Tite. Ce dernier lui ayant
apporté de bonnes nouvelles des Corinthiens, l’apôtre leur écrivit cette
seconde épître. Il était venu une première fois en personne auprès d’eux, puis
une deuxième fois par sa première épître ; il était prêt à venir
personnellement vers eux une troisième fois, mais en attendant il les visitait
une troisième fois par cette seconde lettre (12:14 ; 13:1). Sa deuxième
visite personnelle à Corinthe est, sans aucun doute, relatée dans les versets 2
et 3 du chap. 20 des Actes, mais c’est la seule mention qui en soit faite.
Je donne ces détails pour que nous nous rendions compte des
circonstances extérieures de Paul quand il écrivait cette seconde épître, mais
il est beaucoup plus important pour nous d’y chercher ce que le Seigneur veut
nous y enseigner. J’ai dit une fois qu’on pouvait intituler cette épître : Le ministère chrétien.
Tout en étant
exacte, cette définition est cependant loin d’embrasser l’ensemble des vérités
que le Saint Esprit nous y présente. C’est ainsi que, dans le chapitre que nous
venons de lire, nous trouvons en premier lieu les conditions
dans lesquelles un chrétien doit se trouver pour
exercer un ministère qui puisse être béni au-dehors. Or, en disant « les conditions
du ministère », je parle de chacun de nous, car un certain état moral est
nécessaire pour s’acquitter d’un service quelconque que le Seigneur nous
confie.
Je vous ferai remarquer, au commencement de ce chapitre, une
parole particulièrement édifiante. La voici : « Béni soit le Dieu et Père
de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute
consolation, qui nous console à l’égard de toute notre affliction, afin que
nous soyons capables de consoler ceux qui sont dans quelque affliction que ce
soit, par la consolation dont nous sommes nous-mêmes consolés de Dieu » (v. 3,
4). Vous rencontrez trois fois dans les épîtres ce terme : « Béni soit le
Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ ». Dans la première épître de Pierre,
(1:3), l’apôtre bénit Dieu pour avoir
été régénéré,
c’est-à-dire pour avoir
reçu personnellement la nouvelle naissance, qui caractérise chacun de nous au
début de sa carrière chrétienne. Or, dans cette épître de Pierre, le chrétien
n’a, dans ce monde, aucune autre chose que celle-là. Il a devant lui une espérance
et marche vers elle, sans la
posséder encore ; son salut
ne
lui sera révélé que dans les derniers temps. Ce n’est pas, comme en d’autres
épîtres, un salut actuel, mais une délivrance future et finale. L’apôtre bénit
donc Dieu d’avoir reçu une vie nouvelle, avec laquelle il peut traverser le
monde, sans y rien posséder, et, bien plus, sans avoir obtenu aucune des choses
futures, les ayant encore toutes devant lui. Mais, par la foi en Christ, il
possède la vie divine ; il est parfaitement heureux de ne rien avoir
d’autre et « se réjouit d’une joie ineffable et glorieuse », en recevant « un
salut d’âmes », dans lequel il n’entre que comme « fin de sa foi ». Chers amis,
sommes-nous pleinement satisfaits d’être des enfants de Dieu et de n’avoir
aucune part dans ce monde ? d’avoir tous nos trésors devant nous,
sans les avoir atteints et sans les posséder ? Rien
dans le présent, tout
dans l’avenir ? Cela suffisait
à ces premiers chrétiens et leur communiquait une telle joie, qu’aucune autre
partie de la Parole n’en présente l’expression d’une manière plus élevée :
« Une joie ineffable
et glorieuse
! »
Dans l’épître aux
Éphésiens
(1:3), vous trouvez exactement l’opposé de ce qui nous est dit
dans l’épître de Pierre. Là le chrétien n’a rien
: ici, il a tout
. Il est
introduit dans le ciel
, béni de toute bénédiction
spirituelle dans les lieux célestes ; il est arrivé au but ; les
désirs de son âme sont satisfaits ; sa position est céleste en
Christ ; pour lui le monde a disparu, sauf pour y rendre témoignage et y
combattre ; d’en haut, le chrétien le voit sous ses pieds. Aussi nous
comprenons fort bien cette parole : « Béni soit le Dieu et Père de notre
Seigneur Jésus Christ ! » Toutefois l’une de ces positions du chrétien est
aussi réelle que l’autre. Dans l’une il est dans le monde, dans l’autre il est
dans le ciel. Il est tout à la fois
,
comme Israël, mangeant la manne dans le désert, et se nourrissant du « vieux
blé du pays ».
La seconde épître aux
Corinthiens
nous présente le passage peut-être le plus étonnant des
trois : « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père
des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console à l’égard de
toute notre affliction, afin que nous soyons capables de consoler ceux qui sont
dans quelque affliction que ce soit, par la consolation dont nous sommes
nous-mêmes consolés de Dieu » (1:3, 4). Nous voyons ici un homme, entouré
d’afflictions, d’épreuves, de douleurs, de souffrances si grandes qu’il
désespère de vivre, étant déjà comme jeté dans la poussière de la mort. Quel
est donc pour cet homme le motif de rendre grâces ? C’est que Dieu se sert
des circonstances les plus douloureuses de sa vie pour se glorifier et faire de lui le canal de bénédictions
nouvelles pour d’autres.
Paul est satisfait de souffrir, parce que le Dieu
de toute
consolation le console ou
l’encourage (ce mot a les deux significations) dans toute
son affliction, non pas pour sa propre âme, et en réponse à
ses propres besoins, mais pour qu’il soit capable d’encourager ceux qui sont dans quelque affliction que ce soit.
Paul
avait subi et traversé toutes ces épreuves, et ses provisions de consolations
étaient inépuisables de la part de Dieu pour
lui-même, afin qu’elles le fussent pour d’autres.
Vous trouverez la même pensée dans la suite de cette épître où il se compare à un vase de terre dans lequel Dieu a mis son trésor. Le vase est fêlé ou brisé ; c’était la mort qui opérait en l’apôtre, mais afin que la lumière puisse se répandre au-dehors et aller porter la vie dans le coeur des Corinthiens.
L’apôtre Paul possédait plusieurs secrets de son action et de
son service au milieu des hommes. Nous les verrons dans le courant de nos
lectures ; mais le premier de tous, et ce qui donnait tant de puissance a
son ministère, était qu’il en avait fini avec tout ce qui constituait l’homme
dans la chair : Paul était un
chrétien affranchi.
On peut prêcher l’affranchissement, l’expliquer clairement à
d’autres, sans être soi-même affranchi, car, pour l’être réellement, il ne faut
pas seulement, souvenez-vous-en, connaître
l’affranchissement, mais le
pratiquer.
Ce sont, en effet, deux choses très différentes : expliquer
ce que c’est que d’être mort
avec Christ, ou le réaliser.
L’apôtre le réalisait pleinement.
L’affranchissement a, pour
ainsi dire, plusieurs côtés et comprend plusieurs sortes de délivrances.
Vous trouvez le premier côté au chap. 6 de l’épître aux Romains.
C’est l’affranchissement du péché.
Nous
avons été identifiés avec Christ dans la ressemblance de sa mort et, si nous
acceptons cela par la foi, notre vieil homme a été crucifié avec Lui, afin que
« le corps du péché » (le péché
,
comme
racine
en nous de tous les péchés)
soit annulé pour que
nous ne servions plus le péché ; car « celui qui est mort est justifié du
péché
». Or, si nous sommes
morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec Lui. Tel est donc
le premier côté de l’affranchissement. Nous en avons fini par la mort avec la domination
du péché sur nous. Non pas
que nous n’ayons pas le péché, la chair en nous, mais nous ne sommes plus dans
la chair ; nous avons été affranchis de sa domination. Un autre, Christ,
est venu se mettre à notre place, a été fait péché pour nous (ce n’est pas
seulement qu’il a porté nos péchés), est mort au péché, est vivant à Dieu, et
si nous sommes unis à Christ, nous sommes morts au péché et vivants à Dieu.
Aussi l’apôtre exhorte les chrétiens à se « tenir pour morts », afin que, si le
péché se présente, ils puissent dire : « Je suis mort », et ne lui céder en
aucune manière.
Dans l’épître aux Galates, vous trouvez d’autres côtés de
l’affranchissement. Le premier (correspondant à Rom. 7) se trouve au chap.
2:19. « Par la loi, je suis mort à la loi
». La loi a prononcé sur moi la
sentence de mort, à cause du péché, mais cette sentence a été exécutée
sur Christ, fait péché, quand
il est « devenu malédiction pour nous », afin de « nous racheter de la malédiction
de la loi » (Gal. 3:13, 14). La loi qui me condamnait a
condamné Christ à
mort, quand il a été fait péché pour moi. Désormais, en mourant, Christ est
mort à la loi, et moi de même. Comme Lui, je suis mort au péché, afin que je vive à Dieu ;
comme
Lui, je suis mort à la loi, afin que je
vive à Dieu.
L’épître aux Galates nous présente encore un autre côté de
l’affranchissement (5:24) : « Or ceux qui sont du Christ ont crucifié la
chair avec les passions et les convoitises ». Ici, la crucifixion est l’acte
de ceux qui sont du Christ. C’est
à peu près le « mortifiez vos membres », de Col. 3:5, sauf que, dans notre
passage, c’est une chose faite et accomplie une fois pour toutes. Celui qui,
après être mort avec Christ, a reçu l’Esprit comme puissance de sa nouvelle
vie, est censé avoir fait usage de cette puissance pour en finir avec la chair
et se soustraire à sa domination, car elle domine par les passions,
et par les convoitises qui sont l’amorce des passions.
Nous trouvons donc ici la réalisation pratique, dans la puissance de l’Esprit
de Dieu, de la domination sur la chair qui a déjà rencontré son jugement
complet à la mort de Christ.
À la fin de cette même épître aux Galates (6:14), nous trouvons
encore un nouveau côté de l’affranchissement : « Qu’il ne m’arrive pas à
moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par
laquelle le monde m’est crucifié,
et moi au monde
». L’apôtre était affranchi, par la croix, de tout cet ordre de
choses dont l’homme pécheur est le centre et dont Satan est le prince. Le
monde, le système qui avait mis à mort le Sauveur, était jugé, condamné,
crucifié pour Paul par cet acte même ; et, quand le monde portait les yeux
sur l’apôtre, il voyait un homme crucifié, mort à tout ce que le monde aime,
veut et recherche ; un homme que rien ne pouvait tenter dans la scène de
péché, d’éloignement de Dieu et d’inimitié contre Christ, qu’il traversait ;
scène dont il est dit : « Le monde entier gît dans le Méchant » (1 Jean
5:19). N’est-il pas vrai, chers amis, que nous connaissons fort peu ce côté de
l’affranchissement ? C’est ce qui me fait dire que l’affranchissement
n’est une réalité pour l’âme qu’autant
qu’il est pratiqué.
Un chrétien retenu dans les liens du monde politique,
artistique, scientifique, du monde où l’on s’amuse ou du monde religieux, ne
sera jamais
un chrétien affranchi.
Paul était donc un homme libre de ce qui le retenait
autrefois ; il avait vu la fin de toutes ces choses à la croix ;
aucune d’entre elles ne pouvait revivre pour lui ; elles avaient toutes
reçu le coup de grâce dans le jugement qui avait atteint son Sauveur, aussi
peut-il dire : « Je
suis crucifié avec Christ ; et je ne vis
plus, moi,
mais Christ vit en moi »
(Gal. 2:20). Il était devenu comme une personnalité nouvelle, un nouvel homme,
tout en ayant la chair en lui, mais cette dernière, il la tenait à la seule
place qui lui soit due, dans la mort sur la croix.
Il est si vrai que, pour Paul, l’homme
lui-même est crucifié que, dès le premier chapitre de cette
épître aux Galates, il refuse de lui accorder aucune place dans son ministère.
Il déclare n’être pas apôtre de la part des hommes,
ni par l’homme
. Il ne s’applique pas à satisfaire
les hommes,
ni à complaire aux hommes.
Son évangile n’est pas selon
l’homme
; il ne l’a pas reçu de l’homme
; et, s’il s’agissait même des
meilleurs d’entre les apôtres, Christ n’avait point égard à l’apparence de l’homme
(Gal. 1 et 2).
Revenons maintenant au premier chapitre de notre épître aux
Corinthiens. Nous y trouvons un dernier côté de l’affranchissement qui dépasse
encore celui dont nous venons de parler. Dieu faisait passer l’apôtre par des
circonstances telles, qu’il avait en
lui-même la sentence de mort
, afin
qu’il n’ait pas confiance en lui-même
, mais en Dieu qui ressuscite les
morts (v. 9). Il aurait pu n’avoir aucune confiance dans la chair, dans
l’homme, dans le monde, et cependant avoir confiance en lui-même ; mais
quand la sentence de mort est, non pas prononcée sur lui du dehors
, mais réalisée en lui-même
, il ne peut avoir confiance qu’en
Celui qui ressuscite les morts. À la fin de cette épître, nous apprenons que
quatorze ans auparavant, c’est-à-dire au commencement de sa carrière, l’apôtre
avait fait une expérience tendant au même but. Dieu l’avait transporté au
troisième ciel, où il avait entendu des choses si merveilleuses qu’aucun
langage humain ne saurait les reproduire ; mais, quand il descendit de ces
hauteurs, le danger commença. Il aurait pu s’enorgueillir et prendre confiance
en lui-même. Dieu lui envoie un ange de Satan pour le souffleter, puis il lui
dit : « Ma grâce te suffit ». Longtemps après cette expérience, elle se
renouvelle, car rien n’est plus subtil que le « moi », et il doit être
continuellement tenu en échec. Ici, ce n’est plus l’ange de Satan, c’est la
sentence de mort que rencontre l’apôtre et il l’a tellement réalisée, qu’à la
fin de cette épître il s’écrie : « Je ne
suis rien
» (12:11).
Où est la confiance en soi-même, quand on est souffleté par Satan, quand la
sentence de mort s’exécute ? On n’est plus rien ! Je ne pense pas que
la pratique de l’affranchissement puisse dépasser cette expérience.
La conséquence est que, si l’apôtre n’est rien, Christ est tout pour lui
. Il peut dire : « Pour moi, vivre c’est Christ » et, par
rapport à son ministère, Christ en est le seul objet. Lui seul a pris la place
de toute autre chose dans le coeur, dans les pensées, dans l’activité de Paul.
S’agit-il de ses circonstances, il dit : « Comme les souffrances
du Christ abondent à notre égard » (v. 5). Ses
souffrances ne sont plus les souffrances de Paul ; dans sa carrière
d’amour, il accomplit les souffrances du
Christ,
afin qu’il puisse apporter à d’autres tous les encouragements qui
les accompagnent. Par la grâce de Dieu, il peut parler de lui-même comme d’un
« homme en Christ » (12:2). Telle est chez l’apôtre la réalisation pratique de
l’affranchissement.
Le résultat de cet affranchissement quant à son ministère, était
que sa prédication avait Christ,
et
rien d’autre, pour sujet. Vous avez pu penser, dit-il aux Corinthiens, que je
faisais preuve d’incertitude dans mes desseins, mais il n’y a pas d’incertitude
en Lui, « Car autant il y a de promesses de Dieu, en lui
est le oui et en lui l’amen, à la gloire de Dieu par nous »
(v. 20). Oui, toutes les promesses se résument en Lui. En Gal. 3:14, le Saint Esprit
est une de ces promesses.
C’est en vertu de l’acceptation de Christ et de son élévation à la droite de
Dieu, que la promesse de l’Esprit est devenue notre part. En Tite 1:2, il en
est de même pour la vie éternelle,
mais
il y a encore d’autres promesses : la gloire,
la justice,
le pardon
, l’héritage.
L’apôtre
ajoute : « À la gloire de Dieu par
nous
». Pourquoi ce par nous
? Parce que, chose merveilleuse, Dieu nous a unis à Christ d’une
manière si indissoluble que tout ce qui Lui appartient nous appartient aussi.
La gloire de Dieu est par Christ, mais la gloire de Christ étant notre gloire,
la gloire de Dieu est aussi par nous. L’héritage est à Christ, mais cet
héritage nous appartient. La vie est en Christ, cette vie est à nous. Si donc
Dieu est glorifié par Christ, il l’est aussi par nous.
L’apôtre ajoute : « Or celui qui nous lie fermement avec
vous à Christ et qui nous a oints, c’est Dieu, qui aussi nous a scellés, et
nous a donné les arrhes de l’Esprit dans nos coeurs » (v. 21, 22). C’est donc ce
qui caractérise le chrétien : Il est lié fermement à Christ, fait « une
même plante avec Lui ». Il est oint
de l’Esprit, comme Jésus l’a été, mais
le Seigneur, Lui, en vertu de sa perfection comme homme, et nous, en vertu de
l’oeuvre qu’il a accomplie en notre faveur. Le chrétien est scellé
du
Saint Esprit qui lui apporte la conscience et l’entière connaissance de sa
relation avec Dieu, relation dont le Seigneur jouissait lui-même comme homme
ici-bas. Enfin, l’Esprit est « les arrhes de notre héritage ». Nous allons entrer
dans notre héritage céleste dont, par l’Esprit, nous avons déjà l’avant-goût et
la certitude. Le Seigneur, Lui, y est entré avant nous, tandis que nous n’en
avons que les arrhes ; mais Il attend encore d’entrer dans son héritage terrestre
,
et nous y entrerons aussi avec Lui.
Telles étaient les choses que Paul annonçait. Il « prêchait le
Fils de Dieu, Jésus Christ ». Il montrait la valeur de sa personne et de son
oeuvre, et ce qu’elles étaient pour Dieu et pour nous. Il affirmait qu’en
dehors de Christ, les chrétiens n’avaient rien, et lui ne voulait pas d’autre
place. Il n’avait qu’une pensée,
être
trouvé en Lui, sans autre justice que celle de Dieu ; il n’avait qu’un désir,
celui de le connaître en
traversant ce monde, et de le reproduire dans sa marche ; il n’avait qu’une ambition,
celle de l’atteindre
dans la gloire.
Que Dieu nous donne de pouvoir dire ces mêmes choses, et de pratiquer notre affranchissement de telle sorte que nous soyons de vrais témoins de Christ dans ce monde !
Il existe une certaine liaison entre la première et la seconde
épître aux Corinthiens. Dans la première, les Corinthiens, bénis extérieurement
et comblés de tous les dons spirituels, avaient pris confiance en eux-mêmes,
s’étaient enorgueillis, et cela n’avait pas
eu d’autre résultat que d’amener parmi eux des divisions et toute espèce de
désordre. Il y avait chez eux beaucoup de choses à reprendre, mais je n’insiste
ici que sur les divisions. Ils étaient désunis pour le bien et unis pour le
mal. L’un disait être de Paul, l’autre d’Apollos, et cela les divisait en
sectes diverses. Puis, quand un mal scandaleux s’était présenté dans
l’assemblée, indifférents à ce qui déshonorait le nom de Christ, ils étaient
unis pour le passer sous silence. L’apôtre en avait pris occasion pour montrer
qu’il y a un ordre dans la maison de Dieu, ordre qu’il n’est pas permis
d’enfreindre. Si tous les enfants de Dieu comprenaient cela en ce qui concerne
l’Église ou l’Assemblée, comme le témoignage de cette dernière serait plus
puissant devant le monde !
Ayant reçu l’exhortation, les Corinthiens perdent la confiance qu’ils avaient en eux-mêmes. Une tristesse selon Dieu remplit leurs coeurs et les amène à la repentance. L’apôtre leur montre alors que lui n’avait aucune confiance en lui-même, et se sert de ses propres expériences pour leur édification. Il connaissait la tristesse, il connaissait la puissance de Satan dans le monde. N’ayant aucune confiance en lui-même, il pouvait apporter aux Corinthiens qui n’étaient plus exaltés par la valeur de leurs dons, les consolations que lui-même avait éprouvées.
Mais n’oublions pas que lorsqu’on a surmonté certains dangers,
et c’était le cas pour les Corinthiens, d’autres dangers se présentent. Satan ne se tient jamais pour battu.
S’il
n’a pas réussi à nous vaincre d’un côté, il nous attaquera de l’autre, et il
nous faudra de nouveau lui faire face. Quel était donc le danger que couraient
maintenant les Corinthiens ? Ils avaient été ramenés à une juste
appréciation de la pensée de Dieu quant à la discipline ; ils avaient été,
comme on le voit au chap. 7 de notre épître, remplis de zèle pour juger le mal
parmi eux et avaient suivi les enseignements de l’apôtre à ce sujet. La partie
semblait donc gagnée, car maintenant ils étaient unanimes dans le bien,
unanimes pour exercer une action judiciaire contre le méchant. Ils l’avaient
fait comparaître devant leur tribunal et l’avaient ôté du milieu d’eux. Mais,
au lieu de les louer de ce qu’ils avaient parfaitement accompli leur devoir,
l’apôtre leur dit : Ce n’est pas tout d’être unis dans le jugement ;
il faut que vous soyez unis dans l’exercice
de l’amour
(v. 8). Dieu ne voulait pas les faire demeurer sur une action
judiciaire. Avec le retranchement tout n’est pas fini. Les Corinthiens avaient
ôté le méchant du milieu d’eux, mais l’apôtre avait appris que ce dernier était
accablé de tristesse (v. 7). L’assemblée le laissait dans cet état. Où était
l’amour ? L’apôtre en profite pour montrer ce qu’ils avaient à faire
envers un homme humilié et repentant. Avant toute chose il s’occupe
d’eux ; il leur avait écrit sa première lettre « dans une grande affliction
et avec serrement de coeur, avec beaucoup de larmes, non afin, dit-il, que vous
fussiez attristés, mais afin que vous connussiez l’amour que j’ai si
abondamment pour vous ». La cause de ces larmes était, sans doute, en partie le
péché qui avait été commis dans l’assemblée de Corinthe, si chère à son coeur.
L’apôtre prenait leur place, alors qu’eux ne savaient pas encore pleurer avec
lui. Il pleurait pour eux
sur celui qui, ayant déshonoré le Seigneur,
avait jeté de l’opprobre sur Lui et terni sa gloire au milieu de son Assemblée.
Mais il pleurait aussi sur les Corinthiens, et, remarquez-le, à un moment où
ils ne pleuraient pas du tout. Le souci des assemblées assiégeait
continuellement l’apôtre. Il sentait profondément la dureté de coeur qui avait
rendu les Corinthiens indifférents au mal et avait déshonoré le nom de Christ
au milieu d’eux. Maintenant il ne lui suffisait pas de les voir unis dans le
jugement ; il voulait les voir unis dans l’amour. Il leur dit : Si
moi j’ai pleuré, ce n’était pas pour vous attrister, mais afin que vous connussiez
l’amour
que j’ai si abondamment pour vous. Il voulait qu’ils comprissent
qu’il avait été affligé de les reprendre, de venir à eux avec l’autorité
apostolique pour leur parler de leur péché, dans cette première épître si
sévère, et que les Corinthiens avaient pu estimer froide et dure. La pensée que
leurs coeurs étaient peut-être froissés ne lui laissait pas un moment de
répit ; il désirait savoir quel serait l’effet de sa lettre sur eux. Se
révolteraient-ils ou accepteraient-ils la réprimande ? Paul en était presque
à regretter d’avoir écrit cette épître inspirée ! (7:8).
Tableau touchant de l’amour qui remplissait son coeur ! Trop angoissé pour attendre leur propre réponse à sa lettre, il leur envoie Tite pour qu’il lui rende compte de leur état. En attendant, il est lui-même dans la Troade où la porte est largement ouverte à l’Évangile ; mais une chose est plus importante pour son coeur que même cette oeuvre que Dieu lui confie ! Il l’abandonne, va au devant de Tite en Macédoine, et n’a pas de repos qu’il ne l’ait rencontré.
Cela parle à nos propres coeurs. Il n’y a rien de plus béni, de
plus heureux pour nous que l’Évangile. Quelle joie, quand on le voit pénétrer
dans les consciences et amener des âmes au Seigneur par la conversion !
C’est une oeuvre merveilleuse à laquelle il nous est donné de prendre
part ! Cependant, dans ce moment-là, une chose avait plus d’importance
pour Paul que même la porte ouverte pour l’Évangile. Il désirait voir une vraie
restauration chez ses bien-aimés enfants dans la foi : une assemblée,
reprenant par une repentance complète, par le jugement d’elle-même, un chemin
où le Seigneur pouvait être glorifié. Voilà ce qui remplissait son coeur. Sa
joie était que les frères de l’assemblée de Corinthe marchent ensemble
fidèlement, humblement, dépouillés de toute confiance en eux-mêmes, prompts à
juger le mal, prompts à pardonner au méchant repenti. Il dit : « Si quelqu’un
a causé de la tristesse » (v. 5). Cet homme n’étant pas
encore restauré, l’apôtre ne l’appelle pas : « un frère », et ne le nomme
même pas ; il est : « quelqu’un ». Nous pouvons en tirer une utile
instruction pour la conduite de l’assemblée envers ceux qui sont retranchés.
« Si quelqu’un a causé de la tristesse, ce n’est pas moi qu’il a attristé, mais,
en quelque sorte… c’est vous tous ». Il avait été obligé de les charger dans
sa première épître ; maintenant qu’il les voit attristés, il renonce à
leur écrire sévèrement. Il avait encore, comme nous le verrons plus tard,
beaucoup de choses à reprendre, qu’il aurait pu placer devant eux dès le début
de son épître, mais il ne voulait pas les accabler. Nous apprenons ici de
quelle manière nous avons à nous comporter envers nos frères, quand nous avons
été obligés de les reprendre. Il nous arrive parfois de les charger plus
lourdement encore quand nous voyons que la réprimande n’a pas produit tout
l’effet désiré ; et nous aggravons ainsi le fardeau dont ils sont déjà
accablés. L’apôtre n’agissait pas de cette manière. Voyant les Corinthiens
restaurés dans une mesure, il ne cherchait pas à ajouter à leur accablement. Il
dit : Ce que je désire, c’est la joie, c’est l’amour ; et il les
engage à pardonner, à consoler un tel homme, de peur qu’il ne soit accablé par
une trop grande tristesse. Après vous être repentis, leur dit-il, vous pouvez être
maintenant réjouis, consolés, fortifiés par mon ministère, et vous laissez cet
homme, chez qui la repentance s’est produite, en proie à l’accablement !
(v. 8, 9).
Ils avaient été obéissants pour exercer le jugement ; il
s’agissait maintenant qu’ils soient obéissants pour pardonner
. Paul
désirait savoir s’ils étaient obéissants en toutes
choses
(v. 10). La différence entre cette seconde épître et la première est
très frappante. S’agissait-il de juger le mal, l’apôtre avait décidé de livrer
cet homme à Satan, mais il avait suspendu son verdict. Dans la seconde épître,
il se hâte de pardonner dans la personne de Christ. Au lieu de prononcer le
jugement qu’il avait retardé, il accorde le pardon, afin qu’il soit donné par
la puissance et avec l’autorité de Christ à l’homme qui avait péché. Cela ayant
lieu, l’Ennemi ne pouvait réussir dans ses desseins (v. 11). Satan aurait voulu
répandre de nouveau la désunion, séparer l’assemblée de l’apôtre ; car
ainsi elle aurait été unanime à juger, et l’apôtre tout seul à pardonner.
Lorsque l’Ennemi de nos âmes peut nous empêcher de marcher dans une même
pensée, dans un même sentiment, soyons bien certains qu’il n’y manque pas.
Au v. 14, l’apôtre conclut en disant : Il m’est donc arrivé
d’abandonner l’oeuvre par amour pour vous, mais je puis m’en remettre à la
grâce de Dieu (*) : Il me conduit
« toujours en triomphe dans le Christ ». Un empereur ou un général qui avait
remporté des victoires et soumis des peuples, célébrait un triomphe.
Son char était accompagné d’un cortège portant des
encensoirs. La fumée de l’encens montait autour du triomphateur. Parmi les
captifs qu’il menait à sa suite, les uns étaient destinés à la mort, les autres
à être graciés. Christ ayant remporté la victoire à la croix, l’apôtre
accompagnait son triomphe comme thuriféraire (v. 14). Le parfum, l’odeur de la
connaissance de Christ par l’Évangile, montait autour de Lui pour proclamer la
valeur de Son oeuvre.
(*) Cette oeuvre en Troade, il la reprit après sa seconde visite à Corinthe (Actes 20:2-6).
Paul ajoute : « Nous sommes la bonne odeur de Christ pour
Dieu » ; il se présente ici, en second lieu, lui-même
comme un parfum de Christ qui monte
devant Dieu.
Persécuté, voué à la mort,
humilié, sans aucune confiance en lui-même, ayant besoin d’être continuellement
consolé, il était la bonne odeur de Christ. On pouvait voir, dans la personne
de celui qui accompagnait son Maître, ce que ce Maître, maintenant vainqueur et
triomphateur, avait été ici-bas. Chers amis, sommes-nous, aux yeux de Dieu, le
parfum de Christ, ou faisons-nous monter devant Lui la mauvaise odeur du monde
et de ses convoitises ? Cela parle, me semble-t-il, à nos consciences.
Paul pouvait dire : « Nous sommes la bonne odeur de Christ pour Dieu
». Dieu estimait précieux ce parfum et voulait le répandre pour
glorifier son Fils. C’était une odeur de vie pour ceux qui croient, car la
victoire de Christ leur annonce la délivrance ; mais une odeur de mort
pour ceux qui refusent le salut, car c’est leur condamnation. Les hommes
suivent aujourd’hui, qu’ils le veuillent ou ne le veuillent pas, le triomphe de
Christ ; mais leur attitude vis-à-vis de l’Évangile décide de leur
sort : la vie, s’ils reçoivent la bonne nouvelle ; la mort, s’ils la
repoussent. Dans ce pays-ci, où l’Évangile est connu de tous, quelle est la
condition de ceux qui suivent le triomphe de Christ ? Question sérieuse
pour ceux qui n’ont pas reçu le Sauveur pour la vie !
Quel beau tableau de toute l’activité de l’apôtre, au v.
17 ! Elle était de la part
de
Dieu dans ce monde ; elle était devant
Dieu, avec sincérité, sans fraude ; et il parlait en
Christ ! Toutes les ambitions de Paul se concentraient sur
ce point : agir pour Dieu avec un coeur sincère, agir devant Dieu avec un
coeur droit ; agir en Christ, de manière à n’être pas plus séparé de Lui,
en pensée qu’en réalité ! Que Dieu nous donne d’apprécier la victoire de
Christ, la valeur de son oeuvre et de sa personne, et de pouvoir dire, comme
Paul : « C’est de la part de Dieu, devant Dieu, que nous parlons en
Christ ! »
Le temps assez long qui s’est écoulé depuis notre dernier
entretien me donne l’occasion de revenir un peu sur les pensées contenues dans
les deux premiers chapitres de notre épître. Cette dernière présente un sujet
particulier, le Ministère,
son
fonctionnement, la tâche qui lui incombe, et les qualités indispensables pour
être un ministre de Christ, principes dont nous serons toujours plus pénétrés,
à mesure que nous approfondirons ce sujet. Il est nécessaire de faire remarquer
que le ministère a, dans cette épître, un caractère très étendu. Ce n’est pas
seulement le ministère apostolique ou ministère de la Parole ; car le mot
traduit ici par « ministère » se traduit ailleurs par « service ». En effet, nous
avons tous un
ministère. Si nous
n’avons pas tous le
ministère de la
Parole, à chacun de nous le Seigneur a confié un service, et souvent le plus
infime service aux yeux des hommes a une importance très grande aux yeux de
Dieu. Plus tard, aux chap. 8 et 9, l’apôtre s’étend sur le service pécuniaire à
l’égard des saints, montre comment il faut s’y prendre pour l’exercer, et
s’estime heureux d’y participer lui-même. Pénétrons-nous donc bien de cette
vérité : si nous n’avons pas un don de l’Esprit en faveur de l’Assemblée
ou pour le monde, nous avons tous un service particulier auquel nous devons
vaquer aussi soigneusement qu’à un service public. Si ce dernier a plus
d’apparence aux yeux des hommes, il offre aussi plus de dangers pour celui qui
l’exerce.
En considérant le premier chapitre, nous pouvons conclure que
notre service pour le Seigneur, quand il s’allie à la confiance en nous-mêmes,
sera toujours frappé, non pas de nullité — car il n’y a pas un de nous qui
n’ait à passer, au cours de son service, par le jugement graduel et détaillé de
lui-même — mais du moins frappé de
faiblesse
en proportion de l’importance que nous sommes disposés à nous
attribuer. Comme nous l’avons vu, le plus grand des apôtres disait : « Afin
que nous n’eussions aucune confiance en nous-mêmes » ; « Moi qui suis moins
que le moindre de tous les saints » ; et encore : « Moi qui ne suis
rien ». C’est dans la mesure où cette vérité est réalisée que le ministère
chrétien est béni. Ce jugement absolu de soi-même, l’apôtre l’exerçait pour
être en exemple à ses frères et les encourager dans ce chemin.
À la fin du chap. 1, nous avons vu que l’objet du ministère est Christ
; aussi l’apôtre s’occupe à faire ressortir ses gloires. Il
montre ensuite que, pour présenter Christ il faut de la puissance, qu’il faut
être oint et scellé du Saint Esprit. Rien n’est plus misérable que de présenter
aux âmes la vérité de Dieu comme affaire d’intelligence, ou comme résultat de
nos études, car de cette manière l’action de la Parole sur les consciences est
annulée, l’Esprit de Dieu seul pouvant lui donner efficace.
Au chap. 2, le ministère n’a pas seulement pour but de présenter
Christ, mais il a aussi une action dans l’Assemblée en vue de la discipline
; seulement c’est en amour que la discipline doit s’exercer.
Sans amour, elle n’est qu’un jugement légal qui n’a rien à faire avec l’Esprit
de Dieu. À la fin du chapitre, le ministère est la présentation de la victoire
de Christ aux hommes et la présentation du parfum de Christ à Dieu ;
immense responsabilité pour nous, mais aussi pour ceux qui rejettent notre
témoignage !
Nous arrivons ainsi au commencement du chap. 3, où nous trouvons
une fonction nouvelle du ministère. Ce dernier a pour but, non seulement de
présenter le parfum de Christ dans le monde, mais d’y adresser une lettre de Christ
connue et lue de tous les hommes, Les
Corinthiens étaient sans doute la lettre de recommandation de l’apôtre, mais,
pour Paul, cette lettre était absolument identique avec la lettre de
recommandation de Christ. Paul n’avait point écrit son propre nom sur le coeur
des Corinthiens, mais uniquement celui de Jésus. Combien de ministres de
Christ, au lieu de suivre l’exemple de l’apôtre, ont, hélas pour triste
fonction, d’écrire un nom d’homme, ou le nom de la secte à laquelle ils
appartiennent, ou toute autre chose encore, sur le coeur des croyants !
Le Seigneur avait fourni à Paul les instruments nécessaires pour
écrire la lettre de Christ, et il s’était acquitté fidèlement de sa tâche. Ses
tablettes étaient les tables de chair du coeur, non les tables de pierre de la
loi ; sa plume et son encre, l’Esprit de Dieu ; sa lettre,
l’Église ; son sujet, Christ
— Christ, un seul nom, et rien
d’autre, mais un nom qui contient en une syllabe les conseils éternels de Dieu,
toutes ses pensées et toutes ses gloires !
Comme les Corinthiens, nous sommes le fruit du ministère de
l’apôtre, ce ministère étant contenu dans la Parole de vérité ; et, comme
eux, nous sommes appelés à être la lettre de recommandation de Christ, connue
et lue de tous les hommes ; mais, remarquez-le bien, le ministère de l’apôtre
est appelé ici, non pas à former des individus, mais un ensemble.
L’apôtre ne dit pas : Vous êtes des lettres,
mais vous êtes la lettre
de Christ, quoiqu’il soit
parfaitement vrai que tout chrétien, individuellement, doive recommander Christ
devant le monde. Telle était l’importance de l’Église, de l’Assemblée de
Christ, aux yeux de Paul.
À la fin de ce chapitre, il confie aux Corinthiens le secret qui
leur permettra d’être cette épître de Christ, secret simple et élémentaire,
s’il en fut. Il faut que nous tous
,
car il s’agit toujours ici de l’ensemble des chrétiens (v. 18), nous
ayons pour objet la contemplation du Seigneur. Cette contemplation nous
transforme graduellement à son image glorieuse, de telle manière que le monde
puisse ne voir que Lui
dans son Assemblée.
Ce même chap. 3 nous présente une autre fonction tout aussi
importante du ministère chrétien. Il a un enseignement
en vue. C’est pourquoi l’apôtre résume l’ensemble
de la doctrine chrétienne
dans la parenthèse qui s’étend du v. 7 au v. 16.
Cette doctrine est en contraste absolu avec ce que la loi avait enseigné
jusque-là. Or, parmi les chrétiens de nos jours qui prétendent connaître la
grâce, combien peu la comprennent réellement et la séparent entièrement de la
loi !
Nous trouvons donc ici la différence entre le ministère de la
lettre, c’est-à-dire de la loi, et le ministère de l’Esprit. L’apôtre commence
par montrer que le ministère de la loi est un ministère de mort.
La loi promet, sans doute, la vie à celui qui
lui obéira, mais un homme est-il capable d’obtenir la vie, même promise ?
Ce qui lui rend la chose impossible, c’est le péché. Or le péché n’est pas
autre chose que la propre volonté et la désobéissance de l’homme. Ainsi la loi,
tout en promettant la vie, est un ministère de mort. Elle condamne celui qui ne
l’a pas suivie et le convainc de péché. Tout homme sous la loi se trouve donc
sous un ministère qui le tue en prononçant sur lui la sentence de mort. C’est
le sujet du chapitre 7 aux Romains. La loi anéantissait, une fois pour toutes,
chaque prétention de l’homme à se mettre en règle avec Dieu et à obtenir la vie
de cette manière.
En contraste avec le ministère de la mort, l’apôtre parle, non
pas du ministère de la vie, mais de celui de l’Esprit
, parce que
le Saint Esprit, quand il agit, apporte la vie dans l’âme.
D’autre part, le ministère de la loi est un ministère de condamnation
, tandis que le ministère de l’Esprit est un ministère de justice
; mais il ne s’agit pas d’une justice humaine et légale, car
l’Esprit est venu nous annoncer la justice
de Dieu
. Tel est le contenu
même de l’Évangile, et c’est pourquoi l’apôtre y met une si grande importance.
Il montre comment Dieu a pu concilier sa haine pour le péché (une justice qui
doit condamner le péché) avec son amour pour le pécheur. La justice de Dieu est
ainsi une justice justifiante
et non
pas une justice en condamnation. Cette conciliation de deux choses
inconciliables ne s’est trouvée qu’à la croix de Christ où la justice et la
paix se sont entrebaisées. Il n’existait aucune chose pareille avant le
ministère chrétien dont l’apôtre était le représentant. Ce ministère est le
résumé de toutes les pensées de Dieu à l’égard des hommes. C’est par lui que
nous apprenons à connaître Dieu dans toute sa gloire, dans toute la perfection
de sa nature et de son caractère.
L’apôtre continue et dit : « Ce qui demeure
subsistera… en gloire » (v. 11). Ce qui demeure,
c’est le caractère même de Dieu. Il n’y a plus rien à ajouter à ce que Dieu
nous a révélé de lui-même. Ce que Dieu est, sa gloire tout entière, s’est
montrée dans l’oeuvre qu’il a accomplie à la croix pour nous. Cette oeuvre
subsiste à jamais en gloire.
À la fin de ce passage, il est dit (v. 17) : « Là où est
l’Esprit du Seigneur, il y a la liberté ».
La loi était un ministère d’esclavage qui rendait l’homme incapable de
s’approcher de Dieu ; la grâce nous introduit en Sa présence, et nous
pouvons y contempler sans voile la personne du Seigneur Jésus qui est devenu
justice de Dieu pour nous. Comme nous l’avons vu déjà, avoir une pleine liberté
pour entrer devant Lui, c’est posséder le secret par lequel on peut être
réellement devant le monde une lettre de Christ. Considérer la gloire du
Seigneur, nous transforme graduellement —
de gloire en gloire — à Sa ressemblance. Cette transformation est partielle,
car nous n’avons pas atteint la perfection et ne l’atteindrons jamais ici-bas.
Nous avons vu l’autre jour que tout ce passage présente
l’opposition la plus complète entre le ministère de la loi et le ministère de
l’Esprit. Les deux ministères ne s’accordent en aucun point. Celui de la loi
est un ministère de mort et ne peut faire autre chose que condamner. La loi,
dans son caractère le moins sévère, telle que Dieu la fit connaître à Moïse
lorsqu’il lui donna pour la seconde fois les tables de la loi, ne pouvait
cependant que condamner. Un régime où la loi est mélangée de miséricorde,
régime sous lequel, de fait, Israël se trouvait, car ce n’était pas le régime
de la loi pure, est mortel pour ceux qui l’acceptent. Maintenant encore, ceux
qui, n’étant pas Juifs et s’appelant chrétiens, se placent sous ce régime
mixte, n’ont à en attendre qu’une condamnation absolue, la loi n’étant pas
seulement un ministère de mort, mais un ministère de condamnation
. L’homme
se trouve sous la sentence prononcée par la loi, et cette sentence est
irrévocable. Tout homme placé sous la loi n’y rencontre pas autre chose que
cela, mais Dieu emploie ce moyen pour le convaincre de péché, afin de
l’instruire sur son propre état et de l’amener à reconnaître que la grâce de
Dieu seule peut fournir un sacrifice qui le délivre de la malédiction de la
loi. Par la venue du Seigneur qui apportait la grâce aux pécheurs, tout le
système de la loi, comme moyen de justification, est tombé.
Si la loi est un ministère de mort et de condamnation, le
ministère chrétien est, comme nous l’avons vu, le ministère de l’Esprit et de
la justice. Mais nous trouvons encore autre chose dans le passage que nous
venons de lire : l’Évangile que l’apôtre présentait était l’Évangile de la gloire
et apportait la
connaissance de la gloire de Dieu dans la face de Jésus Christ (4:4, 6).
Souvent, dans les écrits de Paul, il est parlé de l’Évangile (ou bonne
nouvelle) de la gloire. Beaucoup y voient seulement l’idée que le Seigneur,
après avoir accompli l’oeuvre de la rédemption, est monté dans la gloire. C’est
en effet une bonne nouvelle, mais le terme va beaucoup plus loin. La gloire est
l’ensemble de toutes les perfections de Dieu, mis en pleine lumière depuis la
croix. Qui donc les fait connaître ? Qui les met en évidence ? Où
puis-je les voir ? Dans la face de
Jésus Christ.
C’est en Lui que Dieu a manifesté sa haine contre le péché,
sa justice qui devait le condamner, et l’a condamné, en effet, en la personne
du Sauveur. C’est là que Dieu a manifesté sa sainteté, une sainteté qui ne peut
pas voir le mal, ni le supporter en Sa présence. C’est là que Dieu a montré sa
majesté, la grandeur du Dieu souverain qui daigne s’occuper de ses créatures.
C’est là que Dieu a fait éclater son amour, le point culminant de ses
perfections, un amour qui a pris envers nous le nom sublime de la grâce.
La grâce est venue nous
chercher au fond de l’abîme où le péché nous avait plongés, afin de nous sauver
et de nous amener à Dieu.
Voilà ce
qu’est l’Évangile de la gloire de Dieu. Au chap. 3:18, l’apôtre nous montre que
nous pouvons tous
nous présenter
devant cette gloire et nous en pénétrer. Pour nous, aucune crainte devant la
gloire : la justice de Dieu a été pleinement satisfaite par le don de
Christ. Comment cette justice m’atteindrait-elle en condamnation puisque, après
avoir atteint mon Sauveur, elle l’a fait asseoir à la droite de Dieu ?
C’est une chose passée ; l’amour de Dieu a éclaté une fois. envers moi. Je
pense souvent à ce mot : éclaté
.
L’amour a été mis tout à coup en
pleine lumière,
à cet endroit sombre, où le Fils de Dieu, rejeté des
hommes, a été crucifié. Puis-je voir un amour plus complet que celui qui a été
montré à la croix ?
L’apôtre compare maintenant la gloire, manifestée sous la loi,
avec la gloire, pleinement mise en lumière sous le régime de la grâce. Il prend
pour cela l’exemple de Moïse (v. 7). Il y avait une certaine
gloire sous la loi, mais non pas la
gloire.
Vous pouvez vous en rendre compte en lisant le chap. 33 de l’Exode (v. 18) où,
après le péché du veau d’or, Moïse demande à Dieu de voir Sa gloire. L’Éternel
répond que ce n’est pas possible (v. 20-23) ; Moïse ne pouvait voir la
face de Dieu ; celui-ci demeurait seul dans sa propre gloire ; la
nuée était sa demeure glorieuse et personne ne pouvait y pénétrer. Ce n’est que
sous le régime de la grâce que les disciples peuvent entrer dans la nuée et
entendre le Père leur parler de son Fils. Malgré cette interdiction, l’Éternel
fait connaître à Moïse « toute sa bonté » (Exode 33:19), c’est-à-dire une partie
de sa gloire, dans la mesure où elle pouvait être révélée sous la loi (34:6,
7). Il semblerait au premier abord que nous entrons ici sous le régime de la
grâce. En aucune manière. Dieu qui ne peut se renier lui-même, consent à mettre
en avant qu’il est un Dieu de miséricorde, de bonté, de patience, mais tout
autant un Dieu « qui ne peut tenir le coupable pour innocent, et visite
l’iniquité des pères sur les fils jusqu’à la troisième et quatrième
génération ».
Moïse, le médiateur de la loi, était, pour ainsi dire, le seul homme en Israël qui ne soit pas lui-même sous la loi. Il connaissait quelques traits précieux du caractère de Dieu en grâce et pouvait en jouir. Dans ces conditions-là, il sort de devant l’Éternel et se présente devant le peuple (34:29-35). Qu’arrive-t-il ? Sa face resplendissait ! Les quelques rayons de la gloire de Dieu qu’il avait reçus brillaient sur son visage. La vue de cette gloire va-t-elle attirer le peuple ? Bien au contraire : « Ils craignirent de s’approcher de lui ». Ils avaient peur de la gloire, parce qu’elle contenait les éléments de leur jugement. Alors Moïse met un voile sur son visage. Ce fait est le point de départ de tout notre passage.
Mais Moïse ne met pas seulement un voile sur son visage, parce que
les fils d’Israël n’auraient
pas pu supporter cette lumière ; il le met, afin que
le peuple n’arrête pas ses yeux sur la consommation de ce
qui devait prendre fin. Ils ne devaient
pas
voir la gloire. S’ils l’avaient vue, telle que nous la voyons, ils seraient
sortis de dessous le régime sous lequel Dieu les avait placés et auraient vu
Christ dans toutes les ordonnances de la loi. Le régime de la loi aurait été
terminé, et toute la suite des voies de Dieu envers les hommes aurait été
interrompue. Nous, nous voyons dans Sa face tout l’ensemble de la gloire de
Dieu en notre faveur, et nous y découvrons des choses merveilleuses. Dieu se
sert de ces découvertes, pour nous faire apprécier le trésor que nous possédons
en Lui, et pour nous remplir du désir d’imiter notre modèle.
L’apôtre nous montre ensuite que ce voile, qui est sur la face
de Moïse, se trouve aussi, pour les Juifs, sur les Écritures. C’est un jugement
sur eux, selon Ésaïe 6. La seule chose qu’ils devraient voir dans les
Écritures, c’est Christ, et c’est précisément la seule qu’ils n’y voient pas.
Ils savent combien de lettres et de syllabes les Écritures contiennent, mais
ils ne connaissent rien de la personne du Sauveur. C’est ce que nous trouvons
ici : Le voile est sur la face de
Moïse
qui aurait pu les renseigner sur la gloire de Dieu ; il est sur les Écritures
qui leur auraient fait
connaître Christ ; puis, une chose encore : le voile est sur leurs propres coeurs
! (v. 16).
Aujourd’hui, quelle différence ! Nous pouvons considérer, à
face découverte, la gloire du Seigneur ! Le voile est ôté de la face de
notre Moïse, le Seigneur Jésus ; nous pouvons nous tenir devant Lui, pour
le contempler en pleine liberté. Par la rédemption, tout ce que Dieu est, toute
sa gloire, a été manifesté dans le Fils de l’homme et dans le Fils de Dieu. Le
résultat de cette contemplation est que nous sommes transformés en la même
image. Bienheureux les chrétiens qui entrent, avec cette pleine liberté, devant
la face découverte de Jésus Christ, et sont assez occupés de ses perfections
pour les reproduire dans leur marche ici-bas ! Remarquez ces mots :
« Nous tous, contemplant à face
découverte
». Point de voile
sur la face de Jésus Christ, point de voile sur notre visage ! Nos yeux
sont ouverts, ouverts maintenant
; les yeux d’Israël seront ouverts
plus tard, selon Ésaïe 29:18, et selon notre passage (v. 16) : « Quand Israël se tournera
vers le Seigneur, le voile sera ôté ».
Bien-aimés, Dieu nous a ouvert les yeux, mais nous devons les tenir
ouverts. Nous pourrions très
facilement les fermer ; entre les mains de Satan, tout ce qu’il y a dans
ce monde contribue à nous aveugler, si nous n’y prenons garde. Alors, perdant
de vue la gloire de Dieu, il y a arrêt, et, qui pis est, recul dans notre
développement spirituel, et le nom de Christ est vite effacé de nos coeurs pour
être remplacé par les choses qui nous accréditent aux yeux du monde.
Après avoir parlé des Juifs, l’apôtre passe aux nations
(4:1-6) : « Nous
recommandant nous-mêmes à toute
conscience d’homme
devant Dieu ». Paul faisait le contraire de ce que Moïse
avait dû faire : Rayonnant de la gloire qu’il avait contemplée dans la
face de Jésus Christ, il se présentait devant le monde, portant sur son visage,
comme Étienne, le reflet de cette gloire, fruit de l’oeuvre de grâce accomplie
pour les pécheurs. « Et si aussi », dit-il, « notre Évangile est voilé, il est voilé en ceux qui périssent,
en lesquels
le dieu de ce siècle a aveuglé les pensées des incrédules, pour que la lumière
de l’Évangile de la gloire du Christ, qui est l’image de Dieu, ne resplendît
pas pour eux » (v. 3, 4). Comment les nations ont-elles reçu cet Évangile ?
Il y a aussi un voile sur leurs coeurs. Ne le constatons-nous pas aujourd’hui
chez le monde qui nous entoure et qui, portant le nom de Christ, est
entièrement étranger à l’Évangile de sa gloire ? En effet, Satan a réussi
à jeter un voile épais sur le coeur des hommes qui se trouvent en contact avec
la pleine lumière de l’Évangile.
L’apôtre (v. 6) était
un vase d’élection, destiné à porter l’Évangile au monde. Dieu avait fait, à son
égard, une chose merveilleuse, infiniment plus grande que même la création du
monde, et certes, la création du monde n’était pas une chose sans
conséquence ! Lors de la création, quand « il y avait des ténèbres sur la
face de l’abîme… Dieu dit : Que la lumière soit. Et la lumière fut ». La
lumière traverse les ténèbres, et dès ce moment elle brille. Mais, quant au
coeur de l’homme : « La lumière luit dans les ténèbres ; et les
ténèbres ne l’ont pas comprise » (Jean 1:5). Aussi l’apôtre décrit-il ainsi l’état
de son coeur lors de sa conversion : « C’est le Dieu qui a dit que du sein
des ténèbres la lumière
resplendît, qui a relui dans nos coeurs pour faire luire la connaissance de la
gloire de Dieu, dans la face de Christ ». La
lumière de Dieu
, bien
autrement brillante que celle du soleil à la création, a relui dans le coeur de
Saul de Tarse, et pareillement aussi au milieu des ténèbres de nos propres
coeurs, pour se manifester là dans toute sa plénitude. C’est une nouvelle création
, aussi supérieure à la première que le ciel est supérieur à la
terre, une création qui a pour théâtre, non pas le monde tout entier, mais un
pauvre coeur d’homme infirme et ténébreux, étroit et limité, que Dieu a rendu
capable de le contenir Lui,
ainsi que
toute la lumière de sa gloire resplendissant dans la face d’un homme ! Les
choses vieilles sont passées ; toutes choses sont faites nouvelles. Tout
ce que Dieu est en amour est venu se loger dans un coeur d’homme, afin d’y
resplendir. Mais dans quel but ? Non pas afin que l’apôtre (et nous aussi)
la garde pour lui-même, mais afin qu’elle brille et resplendisse au-dehors de
tous ceux auxquels le ministre de Christ la présente. Sans doute, l’apôtre en
jouit profondément pour lui-même et, je l’espère, nous aussi, mais le but de la
lumière est de resplendir au-dehors, tout en remplissant de son éclat les
coeurs dans lesquels elle est venue briller.
Puissions-nous apprécier cette immense grâce ! Quelque faibles que nous soyons, et sans être des « vases d’élection » comme l’apôtre, Dieu nous a faits les dépositaires de tout ce qu’Il est dans la personne de Christ, afin que nous le manifestions au-dehors de notre vie, et que des âmes nouvelles soient amenées à sa connaissance, ou que d’autres soient encouragées par nous dans le chemin de la foi et du témoignage.
Plus je lis les chap. 3 à 5 de cette épître, plus je suis frappé
du sujet dont ils sont remplis. Ce sujet est la gloire.
Permettez-moi donc d’y revenir. On ne peut du reste
jamais assez en parler, car il faut que tout chrétien en ait une vue claire et
nette. Sans doute, entrer dans la gloire, c’est entrer dans le lieu de la
lumière parfaite, mais nous sommes trop habitués à considérer la gloire sous
cet aspect assez vague, si bien que, pour la plupart d’entre nous, la gloire c’est
le ciel
. La chose est si vraie que vous entendez continuellement des
enfants de Dieu dire, quand ils ont perdu un de leurs bien-aimés : Il est
entré dans la gloire. Je suis souvent tenté de répondre : Vous vous
trompez ; il n’y est pas, et vous ignorez ce qu’est la gloire. Pourquoi
donc les saints qui nous ont quittés n’y sont-ils pas ? C’est parce que,
même en nous quittant, ils ne sont pas encore semblables à Christ. On n’est pas
comme Lui
, malgré la jouissance de sa présence, tant qu’on est encore
absent du corps. Il est le seul homme qui, étant ressuscité, ait atteint la
perfection. Or, la perfection de Dieu lui-même, la perfection absolue, l’ensemble des perfections divines,
constitue la gloire
. On peut la voir en Christ qui, dans son corps glorifié,
est le porteur de toutes ces perfections. Un saint délogé est sans doute en
dehors de la scène du péché, jouissant du repos auprès du Seigneur, mais il ne
sera dans la gloire que lorsque « le corps de son abaissement sera transformé en
la conformité du corps de la gloire de Christ » (Phil. 3:21). Il y a donc encore
« quelque chose de meilleur pour nous », une perfection glorieuse, que n’ont pas
atteinte ceux qui nous ont devancés auprès du Seigneur, et dans laquelle nous
entrerons tous ensemble
à sa venue (Héb. 11:40).
Lorsque nous avons abandonné le vague qui s’empare si facilement de nous au sujet des choses célestes, la pensée de la gloire prend une tout autre valeur pour nos âmes. Dans ces chapitres, il nous est parlé de la gloire du Seigneur (chap. 3), de la gloire de Dieu (chap. 4), et de notre propre gloire (chap. 5). Quand il s’agit de la gloire du Seigneur, remarquez tous les noms qui Lui sont donnés dans ces chapitres : Il est le Seigneur, le Seigneur Jésus Christ, le Sauveur, Christ ; enfin il est Jésus. Le coeur de l’apôtre est tellement occupé de Sa personne qu’il ne peut, pour ainsi dire, faire autrement que le nommer de tous les noms qui, venant à sa pensée, expriment ce que Jésus est pour lui, Paul, et ce qu’il doit être pour nous.
Nous avons vu, à la fin du chap. 3, que le grand privilège
chrétien est de pouvoir contempler les gloires de Christ, cachées autrefois,
mais pleinement manifestées maintenant. Si un homme juste, saint, un homme au
coeur aimant, gardait toutes ces qualités au-dedans de lui, à quoi
serviraient-elles ? La gloire n’est pas d’avoir
ces qualités, mais
de les montrer
, de les mettre en
lumière. Or le point culminant de la gloire, c’est l’amour
. Si le
Seigneur avait traversé ce monde sans montrer son amour, où aurait été sa
gloire ? Dans le chap. 1 de l’évangile de Jean, l’apôtre dit : « Et
nous vîmes sa gloire (il parle de Christ, la Parole faite chair), une gloire
comme d’un Fils unique de la part du Père ». Sa gloire ne pouvait être mesurée
que par ce qu’il y avait dans le coeur du Père
,
envoyant ici-bas son Fils unique pour nous. Sa gloire, c’était
son amour, mais son amour apparaissant sous forme de grâce
et de vérité
pour
le pécheur. L’apôtre pouvait dire, en considérant cet homme, abaissé au-dessous
du niveau d’une femme pécheresse, au puits de Sichar, cet homme humilié,
esclave volontaire de tous : « Nous avons vu Sa gloire », mais cette gloire,
quelque grande que soit sa manifestation, n’a pas resplendi de tout son éclat
quand le Seigneur marchait au milieu des hommes. C’est pourquoi, il dit, en
parlant de sa croix : « Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu
est glorifié en Lui » (Jean 13:31). Or Dieu a été tellement satisfait de la
manifestation de cette gloire, qu’il a pris Christ dans le tombeau, l’a élevé à
sa droite et lui a donné une gloire qui, maintenant, remplit le ciel tout
entier. Entré là sans voile, j’y ai vu l’amour, consommé maintenant par son
sacrifice, pour ne parler que d’une de ses gloires. Si je redescends du ciel où
je l’ai contemplé, pensez-vous que je puisse montrer, dans mes rapports avec
les hommes, autre chose que de l’amour ? Montrerai-je un esprit de haine,
d’animosité, de dénigrement ? Et de plus, pensez-vous qu’en sortant de là
je passerai à travers le monde, indifférent, comme cela arrive si souvent, à
l’incrédulité des hommes au sujet de mon Sauveur, ou indifférent à leur propre
misère ? Je souffrirai, n’est-ce pas ? mais je n’aurai qu’une pensée,
leur témoigner de l’amour. C’est ce que nous verrons au chap. 5. Après être
entré dans la pleine lumière de la présence du Seigneur, l’apôtre dit :
« L’amour du Christ nous étreint ». Il m’a été manifesté ; je désire le
manifester à d’autres. En attendant, je suis manifesté à Dieu, et j’espère
l’être aussi à vos consciences. Voilà ce qu’était la gloire pour l’apôtre.
Je désire encore faire une remarque au sujet de ce chapitre, et
de fait au sujet de toute cette seconde épître aux Corinthiens. On pourrait
s’étonner de ce que, parlant de n’avoir aucune confiance en lui-même et de
n’être rien, la personnalité de Paul soit cependant en scène du commencement à
la fin. C’est que son sujet est le
ministère,
et que le ministère est montré dans sa personne
. Il suivait fidèlement son Maître
dans le service de la Parole, dans les secours, les encouragements, les
consolations, les appels adressés aux âmes, et dans la répression du mal. S’il
était devenu un ministre de Christ, ce n’était pas son oeuvre à lui ;
c’était absolument l’oeuvre de Dieu, et il pouvait en parler comme d’une
création nouvelle dans laquelle lui n’avait aucune part, pas plus que
l’ancienne création n’était l’oeuvre du monde créé. Aussi a-t-il une pleine
liberté pour parler de lui-même. Le Dieu qui a voulu que la lumière soit, a
voulu Saul de Tarse pour porter l’Évangile dans ce monde et a relui dans son
coeur. Cet Évangile, ce n’est plus ici la gloire de Christ, mais la gloire de
Dieu. Tout ce qu’est le Dieu invisible a été révélé dans la face d’un
homme ! Merveilleuse connaissance donnée à l’homme ! Y eut-il jamais
rien de semblable ? Un regard sur Christ homme, me fait découvrir Dieu
dans la plénitude de ses perfections et de son amour comme Père ! C’est
pourquoi le Seigneur dit à Philippe : « Qui m’a vu, a vu le Père ! »
(Jean 14:9).
Je dirai maintenant quelques mots sur les versets 7 à 18. On y
trouve, comme nous l’avons dit, la personnalité
du ministre. Il vient nous exposer son histoire morale, nous dire ce qu’il
est personnellement comme porteur du ministère de Christ. Va-t-il nous parler
de ses propres qualités et de ses perfections ? En aucune manière. Quand,
à la fin de l’épître, il parlera de ce qu’il a souffert et de la manière dont
il lui a été donné de réaliser son apostolat, nous l’entendrons parler de
lui-même, pour ajouter : « Je parle en insensé » (11:21). S’il est obligé de
se louer lui-même, il s’accuse de folie, et il n’use d’un tel procédé que pour
convaincre les Corinthiens de la folie de ceux qui cherchent à les détourner de
l’Évangile.
Ici, quand il parle de lui-même, Paul dit : « Nous avons ce
trésor dans des vases de terre, afin que l’excellence de la puissance soit de
Dieu, et non pas de nous ». Des vases de terre ! Tout ce qu’il y a de plus
ordinaire, de plus commun. Un vase de fer vaut mieux qu’un vase de terre ;
un vase d’airain, mieux qu’un vase de fer ; un vase d’or ou d’argent,
mieux qu’un vase d’airain. Paul s’attribue la qualité d’un vase d’argile. Mais pourquoi Dieu a-t-il
choisi une telle enveloppe pour y mettre son trésor ? « Afin que
l’excellence de la puissance soit de Dieu
, et non pas de nous ». Que serait-il arrivé,
si Paul avait été autre chose qu’un vase de terre ? D’un côté, il aurait
pu s’attribuer l’excellence de la puissance, de l’autre, le trésor n’aurait pu
resplendir au-dehors. Il fallait donc un vase de terre, mais plus encore un
vase qui puisse être brisé. Nous en avons un bel exemple quand les compagnons
de Gédéon vont combattre Madian. Leurs torches étaient conservées dans des
cruches vides et, pour faire resplendir la lumière, ils brisèrent leurs
cruches. Dans le cas de Gédéon, il s’agissait du combat contre le monde ;
la lumière qui remportait la victoire ne pouvait briller dans tout son éclat
qu’à part toute intervention de puissance humaine. Dans notre passage, il
s’agit de l’influence du ministère sur
les enfants de Dieu
. Le trésor
de lumière et de vie que Dieu voulait communiquer aux Corinthiens était contenu
dans un vase de terre. Paul décrit comment Dieu s’y est pris avec lui, non pas
pour briser complètement le vase, mais pour le
fêler
. La tribulation, la
perplexité, les persécutions, s’adressaient au vase, et il fallait qu’il en fût
ainsi, mais il n’était ni réduit à l’étroit, ni sans ressource, ni abandonné,
parce que Dieu veillait sur son trésor, en vue du développement de la vie de
Christ dans les Corinthiens. Dieu s’occupait ainsi de son cher serviteur, afin
que, par lui, la lumière de la gloire de Dieu dans la face de Jésus Christ
pénêtre dans le coeur de ses enfants dans la foi. Mais si Dieu
agissait ainsi envers lui, Paul
, de son côté, n’était point inactif.
Il dit : « Portant toujours, partout, dans le corps, la mort de Jésus, afin
que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre corps ». Ce : portant
toujours
, partout
, est très beau. L’apôtre était
lui-même actif, pour porter en tout lieu et à tout instant la mort de Jésus,
c’est-à-dire le caractère moral de Christ, quand il s’offrait lui-même à Dieu,
dans une obéissance parfaite. Il le faisait librement
et ne laissait pas un moment s’écouler sans le faire. Il voulait qu’en tout
on voie en lui la mort de cet homme venu ici-bas pour mourir, et l’apôtre
réalisait cela par la mort au péché, au monde, à la chair, à lui-même — dans
une dépendance complète de Dieu, séparé par la mort de tout ce à quoi il
appartenait autrefois : ainsi la vie que ce vase renfermait était
manifestée.
Mais de plus, l’apôtre montre ici que Dieu avait soin de faire lui-même
ces choses, là où, pauvres et
faibles que nous sommes, nous serions en danger de ne pas les réaliser
suffisamment. Ne faisons-nous pas, en effet, continuellement l’expérience que,
s’il s’agit de marcher dans la dépendance du Seigneur ici-bas et d’y
représenter Christ, nous y manquons ? Combien cela est vrai ; combien
cela m’humilie ! Mais Dieu va prendre soin de moi. L’apôtre dit :
« Car nous qui vivons, nous sommes toujours livrés à la mort pour l’amour de
Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre chair
mortelle » (v. 11). « Livrés à la
mort
! » Ce n’est plus
Paul qui se livre ; c’est Dieu qui le livre ! Comme il l’a dit en 1
Cor. 15:31 : « Je meurs chaque jour ». Dieu a soin d’appliquer la sentence
de mort à nos circonstances. Il faut que nous passions à travers les
difficultés, le deuil, la mauvaise réputation, que nous soyons humiliés de
toute manière, que nous soyons malades… que sais-je encore ? afin que la
vie de Jésus soit manifestée en nous. Il y a, en cela, une grande différence
entre nous et l’apôtre. Ce dernier ne traversait pas ces choses pour lui-même,
mais pour ses chers Corinthiens. Comme nous l’avons vu, au chap. 1, consolé
pour les autres, nous le voyons ici, un pauvre vase brisé pour les autres. Il
pense si peu à lui-même qu’il se réjouit de traverser tout cela, afin que cette
pure lumière de Christ, contenue dans le vase de terre, puisse être versée en
d’autres pour les remplir de vie. Celui qui s’approchait de Paul, que
voyait-il ? Le grand apôtre des gentils ? Non, mais un pauvre homme,
extérieurement misérable, souffleté par Satan, portant sur son corps des
stigmates qui le rendaient méprisable aux yeux des hommes, mais plus on
considérait ce vase brisé, plus on recevait de son contenu, et ce contenu était
Christ
. Alors le coeur était rempli de reconnaissance et de
joie !
Je voudrais encore faire une remarque sur les derniers versets
de ce chapitre : « C’est pourquoi nous ne nous lassons point ; mais si
même notre homme extérieur dépérit, toutefois l’homme intérieur est renouvelé
de jour en jour » (v. 16). L’homme intérieur
est toujours le nouvel homme (Éph. 3:16 ; 4:23) ; il est
renouvelé par l’Esprit. Nous avons vu « la gloire de Dieu dans la face de Jésus
Christ », puis Dieu travaillant dans son apôtre bien-aimé, pour que cette gloire
aille au-dehors atteindre et remplir le coeur des saints. Maintenant nous
apprenons que Dieu a amené l’apôtre, à travers toutes ces tribulations, pour le
faire jouir lui-même de la gloire
. Il veut que la gloire resplendisse aussi dans le coeur
de son bien-aimé
serviteur. Celui-ci met sur un plateau de la balance les tribulations, sur
l’autre la gloire. Immédiatement la gloire descend de tout son poids jusqu’au
fond du coeur de l’apôtre pour qu’il en ait l’entière jouissance. La
tribulation a produit « un poids éternel de gloire » souverainement excellente.
Le coeur de Paul n’est donc pas seulement occupé à manifester au-dehors la
gloire de Christ, mais il en jouit pour lui-même « en mesure surabondante
! »
« Un poids éternel de gloire ! » Je ne crois pas qu’on puisse
employer des expressions plus fortes et plus absolues pour exprimer la jouissance actuelle de la gloire.
L’apôtre
ne regarde pas en avant vers un jour où il pourra en jouir dans la perfection.
Elle remplit son coeur. Dans ce coeur auquel le monde ne peut rien offrir, qui
est brisé de toutes manières, il n’y a pas de place pour autre chose. La gloire
souverainement excellente s’en est emparée, personnifiée dans un homme glorieux
dans le ciel !
Au chap. 5, l’apôtre montre qu’il aura la gloire pour son corps
, mais il parle ici de la gloire actuelle pour son âme
. Paul était
un homme qui n’arrêtait pas, comme nous, ses yeux sur une quantité d’objets de
distraction dans ce monde. Il nous suffit de traverser une rue pour en
rencontrer mille. L’apôtre n’en avait pas. Il dit : « Nos regards n’étant
pas fixés sur les choses qui se voient, mais sur celles qui ne se voient pas »
(v. 18). Ce n’est pas avec les yeux du corps qu’on peut voir aujourd’hui les
choses invisibles, mais avec les yeux de l’âme. Quand le Seigneur viendra, nous
le verrons avec les yeux de nos corps glorifiés, capables de saisir tous les
détails de sa gloire ; mais maintenant les yeux de la foi, de l’Esprit,
pénètrent au-delà de cette sphère dans laquelle, pour le moment, nous avons à
nous mouvoir ; au-delà des brouillards de la terre, ils voient les choses
glorieuses qui sont dans le ciel, et vont se fixer sur Jésus.
Comme l’apôtre, nous pouvons, nous aussi, réaliser cela, et être remplis d’un poids éternel de gloire, si nos coeurs sont occupés de Lui seul !
Arrivés au chap. 5, nous apprenons que, malgré toutes les choses
merveilleuses dont les chapitres précédents nous ont entretenus, telles que
contempler le Seigneur, être transformés à son image, communiquer sa vie
au-dehors, jouir de ses gloires dans notre âme, il nous en manque encore
une : c’est de Lui être conformes
. Être conformes n’est pas la même
chose qu’être transformés
. Notre transformation se fait très lentement,
comme celle des chrysalides qui semblent rester des mois dans le même état,
quoique la transformation d’où sortira un jour le papillon complet, s’opère en
secret. Pour lui être conformes, il faut que nous le voyions de nos propres
yeux. C’est pourquoi l’apôtre aborde ici la question de notre corps
.
L’âme peut jouir du Seigneur, mais qu’adviendra-t-il du corps
?
« Nous savons que si notre maison terrestre, qui n’est qu’une tente, est
détruite, nous avons un édifice de la part de Dieu, une maison qui n’est pas
faite de main, éternelle, dans les cieux » (v. 1). Dans toutes les épîtres, le
mot « nous savons » indique la certitude chrétienne absolue ; mais je ne
sais si le mot « nous avons » vous embarrasse, comme il m’embarrassait autrefois.
L’apôtre présente le corps comme une tente qui est détruite, et l’on pourrait
croire, d’après le mot « nous avons », que l’édifice, notre corps glorieux, nous
est déjà préparé d’avance
dans le ciel. Cela ne se peut pas, car nous
entrerons dans le ciel avec le corps que nous possédions ici-bas, mais transformé
en la conformité du corps de sa gloire
(Phil. 3:21). J’ai compris depuis
que ce passage fait allusion, d’un côté au tabernacle, de l’autre au temple. Le
peuple d’Israël a eu pendant longtemps, même après son entrée en Canaan, comme
« maison », la tente érigée par Moïse dans le désert. Cependant cette tente ne
devait pas durer toujours. Quand Salomon édifia le temple, il y transporta tous
les ustensiles du tabernacle, qui lui-même disparut ensuite. Tout ce qu’il contenait
faisait désormais partie du temple
. C’était la même maison, et cependant
l’une était passagère et l’autre subsistait glorieuse. Malgré cela, le temple
de Salomon était destiné à la terre ; il n’était qu’une image des choses
célestes ; il était « de cette création », il était « fait de main » (Héb.
9:11). Nous avons aujourd’hui un tabernacle où Dieu habite, car notre corps est
son temple ; mais, comme le tabernacle, ce corps peut être détruit.
Seulement « nous savons », nous sommes absolument certains par la foi, que, s’il
est détruit, il sera remplacé par une maison éternelle dans les cieux. Ce sera
la même maison, mais elle ne sera pas de cette création. L’Esprit de Dieu y
habitera en gloire, comme il habite aujourd’hui en faiblesse dans notre maison
terrestre. L’apôtre se réjouit à la pensée que, si sa tente est détruite, sa
maison future durera éternellement dans le ciel.
En fixant les yeux sur Jésus, l’apôtre voyait ce qui s’était
passé pour le Seigneur et ce qui, par conséquent, devait se passer pour nous
tous. « Détruisez ce temple », avait dit Jésus, « et en trois jours je le
relèverai ». Il était venu dans ce monde pour laisser sa vie et, par conséquent,
l’homme pouvait la lui ôter. Le temple de son corps pouvait être détruit, mais
il a pris en résurrection un corps glorieux. Ce corps qu’il habitait ici-bas,
sans trace de péché, était un corps saint, mais n’était pas un corps
glorieux : il l’est devenu par la résurrection. L’apôtre regarde au ciel,
y voit Jésus dans son corps glorifié et peut dire : J’ai une maison, elle
m’appartient, elle est dans les cieux. Un autre homme l’a déjà revêtue ;
je la revêtirai donc aussi et cela remplit son coeur de joie. Il dit :
« Car aussi, dans cette tente, nous gémissons ». Cette maison terrestre est, en
effet, un lieu où l’on entend bien des soupirs, où coulent bien des larmes,
mais il ajoute : « désirant avec ardeur d’avoir revêtu
notre domicile qui est du ciel ». Il a affaire avec la
destruction de la tente, il y gémit, mais la mort n’est pas du tout ce qu’il
attend. Son désir est non pas d’être dépouillé, mais d’être revêtu
, afin que ce qui est mortel soit absorbé par la vie
. Il
attend le Seigneur Jésus dont la venue, tout en ressuscitant les saints
endormis, transformera nos corps mortels, à nous qui vivons, sans que nous ayons
à passer par la mort. C’était là le désir de l’apôtre. Sans que sa maison
terrestre eût besoin d’être détruite, il désirait être tel que Christ, auprès
de Lui, éternellement avec Lui. Cette espérance positive et actuelle ne lui
fait cependant pas perdre de vue que le temps de déposer sa tente peut être
proche. Il dit : Serait-ce, dans ce cas, une perte pour moi ? Loin de
là ; « nous avons… toujours
confiance, et nous savons qu’étant présents dans le corps, nous sommes absents
du Seigneur ». C’est cela qui est une perte ! aussi il ajoute : « Nous
avons… de la confiance, et nous aimons
mieux être absents du corps et présents avec le Seigneur
». C’est l’état de l’âme séparée du
corps. S’il faut mourir, il sera présent avec le Seigneur. Que va-t-il choisir ?
Il ne choisit pas. Il est content de marcher par la foi, non par la vue. Il y a
une chose qu’il « aime mieux », mais ce qu’il « désire avec ardeur
», c’est
d’être revêtu
. La même alternative se présente devant lui dans l’épître aux
Philippiens (chap. 1) : s’il faut que je reste, c’est Christ, et il vaut
bien la peine de le servir ; mais mourir est un gain ; mon désir est
donc de déloger et d’être avec Christ, ce qui est beaucoup meilleur.
L’apôtre se trouve donc ici devant trois possibilités : voir sa tente détruite et ressusciter immédiatement pour obtenir une maison qui n’est pas faite de main, éternelle, dans les cieux ; revêtir, à la venue du Seigneur, son domicile qui est du ciel, sans passer par la mort ; quitter cette tente et être absent du corps, dans un état qui n’est pas la perfection, mais être présent avec le Seigneur. Même cette troisième solution lui suffit, et il peut dire : « Cela est de beaucoup meilleur ».
Si, faisant un retour sur nous-mêmes, nous nous demandons
comment notre âme se comporte vis-à-vis de ces trois éventualités, que
répondrons-nous ? Disons-nous, devant la possibilité de la mort : Je
suis parfaitement heureux de pouvoir échanger
cette pauvre maison contre une maison glorieuse que je connais bien,
puisque mon Sauveur l’a revêtue ? Disons-nous peut-être : J’attends
le Seigneur d’un moment à l’autre ? Dieu ne m’a pas formé pour mourir,
mais il m’a « formé à cela même », c’est-à-dire à être revêtu,
afin que ce qui est mortel soit absorbé par la vie, et j’ai
déjà son Esprit comme arrhes de mon espérance (v. 4, 5). — Disons-nous enfin,
quand la mort se présente à nous avec la pensée d’une résurrection plus ou
moins retardée, que nous aimons mieux
être
absents du corps et présents avec le Seigneur ? D’où vient, chers
amis, que nous réalisons si peu ces choses ? Nous pouvons le voir dans
tout ce passage : de ce que la personne du Seigneur Jésus n’a pas pour
nous la valeur qu’elle doit avoir, la valeur qu’elle avait pour l’apôtre Paul.
Christ était l’espérance journalière de son âme : son coeur n’était occupé
que de Lui ; il n’avait dans ce monde aucun autre objet qui puisse
l’attirer. Pour lui, vivre c’était Christ, et son coeur n’avait pas de place
pour y loger autre chose.
Tressaillons-nous de joie à la pensée que, d’un moment à l’autre, le Seigneur peut venir, mais aussi qu’il peut nous appeler à déposer notre tente, pour aller attendre auprès de Lui la perfection dans laquelle lui-même est entré et dans laquelle nous serons ses compagnons, éternellement ?
Selon une remarque faite par d’autres, ce chapitre est le seul,
dans le Nouveau Testament, où le mot « nous » soit employé indistinctement pour tous les hommes
, tandis qu’il s’applique, partout ailleurs, aux croyants seuls.
Il faut donc distinguer dans ce chapitre quelle attitude ont croyants ou
non-croyants, devant les grands faits qui concernent indistinctement tous les
hommes : le péché, la mort, le jugement. Cette constatation est de la plus
grande importance pour la prédication de l’Évangile.
Nous avons vu, au commencement de ce chapitre, que tous les
hommes devront paraître devant Dieu. L’apôtre le désirait pour lui-même ;
non pas qu’il désire être dépouillé de son corps, tout en admettant que cela
puisse avoir lieu, mais il désirait être revêtu de son corps glorieux. Que le
Seigneur doive venir, alors que lui, l’apôtre, serait couché dans le sépulcre,
ou alors qu’il serait encore vivant dans ce monde, ce qu’il attendait, c’était
d’être revêtu d’un corps glorieux pour se présenter devant Dieu. Mais il montre
en même temps qu’il faut que tous les hommes
ressuscitent : « Si
toutefois », dit-il, « même en étant vêtus, nous
ne sommes pas trouvés
nus
» (v. 3). Tous devront se présenter corporellement devant Dieu, mais les
uns seront revêtus
d’un corps glorieux, les autres simplement vêtus
d’un corps ressuscité ; les premiers ont part à la première
résurrection ; la résurrection des seconds, qui aura lieu beaucoup plus
tard, est appelée la seconde mort. On peut être vêtu d’un corps ressuscité et
pourtant être trouvé nu
devant Dieu, c’est-à-dire dans un état où le
jugement de Dieu doit nécessairement atteindre les hommes. Quand Adam, après la
chute, croyait s’être vêtu, il se trouve nu devant Dieu, et ce fut sa
condamnation. Il en est toujours ainsi : l’homme trouvé nu devant Dieu doit
subir sa peine ; c’est pourquoi Dieu, voulant sauver Adam, le revêtit
lui-même de peaux de bêtes sacrifiées. Les croyants, quand ils se présenteront
devant Dieu, seront non seulement vêtus d’un corps ressuscité
, car ce
dernier ne pourrait les garantir, mais revêtus d’un corps glorieux
,
pareil à celui de leur Sauveur, revêtus de la gloire qui Lui appartient,
revêtus de la justice de Dieu lui-même. Comment Dieu pourrait-il ne pas nous
recevoir en sa présence, revêtus de toutes les qualités glorieuses qui sont la
part de son Bien-aimé ? Il faudrait pour cela qu’il rejette Christ
lui-même !
Dans ce que nous avons lu aujourd’hui, nous trouvons une seconde
vérité qui concerne à la fois les croyants et les non-croyants : « Il faut
que nous soyons tous
manifestés devant le tribunal du Christ, afin que
chacun reçoive les choses accomplies dans le corps, selon ce qu’il aura fait,
soit bien, soit mal » (v. 10). Comme il y a deux résurrections, il y a aussi deux
comparutions
devant le tribunal du Christ. S’il s’agit de la résurrection
des méchants, appelés les morts, nous apprenons qu’ils seront vêtus d’un corps
ressuscité, afin de paraître devant le « grand trône blanc », érigé quand il
n’est plus trouvé de lieu, ni pour la terre, ni pour le ciel (Apoc. 20:11-15).
Ce trône est pour eux
le tribunal de Christ. C’est là que le Seigneur
Jésus est assis pour juger, car il est dit de Lui que Dieu l’a établi juge, non
seulement des vivants, mais aussi des morts. Or, tout ressuscités qu’ils
soient, ces hommes sont des morts. Devant ce tribunal les livres sont ouverts,
le livre de vie d’un côté, le livre des responsabilités de l’autre. Pas un seul
mot ne sort de la bouche de ceux qui se tiennent devant ce tribunal. Ils sont
jugés d’après leurs oeuvres, s’ils ne sont pas trouvés écrits dans le livre de
vie.
Il y a une seconde face du tribunal qui a trait d’une manière exclusive aux enfants de Dieu
. « Il nous faut tous être manifestés
devant le tribunal du Christ ». Il arrivera un moment, pour nous, chrétiens, où
tout ce que nous avons été ou fait sera mis en pleine lumière devant le
tribunal du Christ, en la présence de Dieu, et où rien, absolument, ne sera
caché. Mon histoire tout entière, depuis le commencement, jusqu’au moment où il
plaira à Dieu de me rappeler à Lui, sera mise au jour. Combien de fois nous
entendons des chrétiens nous dire : Faudra-t-il donc que mes péchés
passés, dont je me suis repenti, soient mis en lumière devant le
tribunal ? Oui, chers amis, nous devons tous être manifestés dans cette
lumière parfaite ! Pourquoi les chrétiens craignent-ils une telle
comparution ? Ils pensent au moment où tous les yeux verront se dérouler
leur histoire du commencement à la fin, toutes leurs fautes cachées, toutes les
choses blâmables ou odieuses de leur carrière ici-bas, dont peut-être même
leurs intimes n’avaient jamais eu connaissance ! Il est parfaitement vrai
qu’il en sera ainsi. Tous les regards des saintes myriades seront arrêtés sur
ma vie passée et la connaîtront dans ses moindres détails. Mais il est une
chose beaucoup plus sérieuse encore que celle-là, à laquelle ces chrétiens
pensent peu ; c’est que, sous les yeux
de Dieu
, tout ce
qu’ils ont fait sera mis en pleine lumière et qu’ils seront manifestés devant
le tribunal du Christ
!
Dans quelle qualité y serai-je manifesté ? Nous avons déjà
vu que les hommes, manifestés comme pécheurs devant ce tribunal, devront porter
la conséquence de leurs oeuvres. Nous, chrétiens, nous y serons manifestés dans le même caractère que le Juge
, revêtus de toutes ses perfections
dans un corps ressuscité en gloire
. Nous ne craindrons pas la lumière
portée sur toute notre vie passée, car nous savons déjà que la grâce de Dieu a
trouvé moyen, à travers toutes nos misères, de se glorifier elle-même, de faire
sortir sa gloire, même de nos péchés, tout en nous en faisant porter la
discipline ou le châtiment dans ce monde, mais pour nous amener finalement là
où il voulait nous avoir, dans la gloire de Christ. Voilà, chers amis, ce qui
me rend heureux à la pensée du tribunal. Si ma vie n’y était pas montrée dans
tous ses détails, la grâce de Dieu qui a réussi, malgré tout, à m’amener dans
la gloire, cette grâce ne serait pas pleinement révélée. Cela soutient le
coeur. Au lieu de craindre que mes misères ne soient mises en lumière, je pense
que Christ a été glorifié en dépit de tous mes manquements, et comment ne m’en
réjouirais-je pas ? Si la grâce de Dieu n’avait pas été là, tout le long
de ma course, comment serais-je arrivé au salut et à la victoire finale ?
D’où vient qu’un chrétien a peur du tribunal de Christ ? De ce que sa conscience n’est pas à l’aise. Dans une conférence à laquelle j’assistais, le frère qui en avait la direction dit à voix basse, à quelques-uns de ceux qui l’entouraient : Je n’ai jamais vu un chrétien en mauvais état spirituel, qui n’ait des questions à soulever au sujet du tribunal de Christ. Dans le moment même, tout au bout de la salle, un ouvrier du Seigneur, dont l’état moral donnait des inquiétudes, appréhensions qui furent confirmées dans la suite, se leva et dit : Je voudrais poser une question au sujet du tribunal. Pensez-vous que les péchés commis par les chrétiens dans le cours de leur vie, reviennent tous en mémoire ? Il n’y eut pas de réponse ; celui qui posait la question donnait lui-même la réponse.
Nous trouvons ici, comme ailleurs, que chaque chrétien recevra,
devant le tribunal, « les choses accomplies dans le corps, selon ce qu’il aura
fait, soit bien, soit mal ». Chacun recevra une récompense, ou éprouvera une
perte, selon la manière dont il aura servi le Seigneur ici-bas. À celui qui
marche mal, je ne puis pas dire : Tu seras sauvé quand même ! Je lui
demande : Où sera ta couronne ? Quelle place occuperas-tu dans la
gloire ? N’éprouveras-tu pas une perte ! Et quelle perte ! Il en
sera ainsi de tout chrétien qui n’a pas marché à la hauteur de sa vocation.
C’est pourquoi le Seigneur dit à Philadelphie : « Tiens ferme ce que tu as,
afin que personne ne prenne ta couronne
». La couronne accordée à la fidélité
peut nous être ôtée et donnée à d’autres. C’est ce que signifient ces
mots : « Recevoir les choses accomplies dans le corps, selon ce qu’il aura
fait, soit bien, soit mal ».
Si j’ai perdu ma couronne, si j’ai déshonoré Christ, ce sera à
ma honte et à ma confusion, au moment où
je réaliserai
que je dois paraître devant le tribunal, mais, arrivé là, je
serai le tout premier à déclarer que cette sentence est juste, à la gloire du
Dieu saint et de son Christ. Je me console en pensant qu’à ce moment-là, si
Dieu m’ôte ce que ma fidélité aurait pu acquérir et le donne à un autre, dont
peut-être je n’appréciais que peu la piété, ce sera une chose juste qui
glorifiera parfaitement le Seigneur.
Qu’ai-je donc à faire en vue du tribunal ? J’ai à réaliser
d’un côté ce que dit l’apôtre : « Connaissant donc combien le Seigneur doit
être craint » ; de l’autre : « Être manifesté à Dieu » (v. 11). Il nous
faut nous tenir dès ici-bas dans la lumière de ce tribunal, et ne pas attendre
d’être dans le ciel pour nous y présenter. C’est ce que nous trouvons ici. Paul
passait sa vie dans la pleine lumière du tribunal du Christ. Sans se faire
aucune illusion, il voyait et connaissait qu’il n’y avait point de bien en lui,
c’est-à-dire en sa chair ; il se jugeait à fond et continuellement.
N’ayant aucune confiance en lui-même, il ne s’appuyait sur quoi que ce soit qui
soit en lui, mais il voulait une chose : « Être manifesté à Dieu » ;
comme il est dit au Ps. 139 : « Connais-moi, sonde-moi ». Il réalisait le
tribunal ici-bas,
et désirait savoir,
avant de s’y présenter dans le ciel
, s’il y avait au fond de son coeur
quelque « voie de chagrin », afin d’être conduit « dans la voie éternelle ». Son
âme se trouvait continuellement en la présence de Dieu et voulait être connue
de Lui, ne désirant qu’une chose, c’est que Dieu continue à la tenir, à chaque
instant, sous la pleine lumière de sa face, afin de lui faire découvrir tout ce
qui aurait pu être un piège et l’éloigner de Dieu, tout ce qui aurait pu lui
faire perdre la récompense du témoignage chrétien. Et remarquez ceci :
l’apôtre pouvait se rendre ce témoignage : « Nous avons été manifestés à
Dieu, et j’espère aussi que nous avons été manifestés dans vos consciences ».
Nous ne désirons rien vous
cacher, pas plus que nous n’avons rien de
caché pour Dieu.
Est-ce le cas pour nous ? Vivons-nous devant Dieu et devant les hommes de manière à ne rien cacher, ni à l’Un, ni aux autres ? L’apôtre faisait cela ; il sentait tout le sérieux du tribunal du Christ, mais cette pensée le laissait parfaitement heureux et tranquille, et au moment d’achever sa course, il pouvait dire en toute assurance : « Désormais m’est réservée la couronne de justice » (2 Tim. 4:6-8).
Il revient maintenant au sujet de son ministère. Qu’est-ce que
la pensée du tribunal a produit sur Paul comme ministre de Christ ? S’il
est sans crainte pour lui-même, il sait que c’est une chose terrible pour les
pécheurs d’avoir à paraître devant le trône du jugement. Cette pensée le pousse
à employer toute la puissance de persuasion que Dieu lui a donnée, pour montrer
aux hommes combien le Seigneur doit être craint, et les engager à ne pas
remettre à plus tard la comparution devant Dieu. Mais ce n’est pas tout que la crainte ;
il ajoute au v.
14 : « Car l’amour
du Christ nous étreint ». La crainte du Seigneur,
l’amour du Christ, tels sont les deux grands motifs pour celui qui présente
l’Évangile. Nous pouvons parler de cet amour puisque nous en sommes les objets,
et de cette crainte puisque nous la connaissons nous-mêmes. Seulement pour
nous, la crainte n’est pas la peur
de
rencontrer le Dieu juste, mais la crainte de lui déplaire ou de le déshonorer.
Si le résultat du tribunal était produit actuellement dans nos âmes, combien nous serions poussés à nous adresser aux hommes pour leur dire : « Fuyez la colère à venir ! » Dieu nous a appris à nous-mêmes à la fuir et nous en a délivrés. Faites comme nous, apprenez, pendant qu’il en est temps encore, à vous juger vous-mêmes, afin que vous ne soyez pas livrés au jugement. L’apôtre parlait ainsi ; il persuadait les hommes. L’amour de Christ le pressait, sans repos ni trêve. Toute sa vie s’est passée à s’adresser aux pécheurs dans ce monde, afin de les amener à recevoir le salut gratuit que Dieu leur offrait par Christ.
« L’amour du Christ nous étreint », dit-il « en ce que nous avons
jugé ceci, que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu’il est
mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais
pour celui qui, pour eux, est mort et a été ressuscité » (v. 15). Nous trouvons
ici de nouveau les croyants et les non-croyants compris dans la même catégorie.
Si Christ est mort pour tous,
convertis
et inconvertis, c’est la preuve que tous sont morts. Si un seul homme avait pu
être excepté de cette mort morale de tous les hommes, Christ n’aurait pas dû
mourir pour tous. En est-il qui soient sortis de cette mort morale ?
Oui : ceux qui ont accepté, par la foi, le sacrifice de Christ, ceux-là
vivent, Mais si le Seigneur est mort pour tous, pourquoi tous ne vivent-ils
pas ? Quel est donc l’obstacle qui s’oppose au salut de tous les
hommes ? Le seul
et unique
obstacle est la volonté de
l’homme
!
La vie chrétienne consiste, chers amis, à ne plus vivre pour soi-même
.
Si elle est bien comprise, l’égoïsme du coeur naturel de l’homme pécheur
n’y a plus de place. Le but de Dieu, en nous donnant la vie éternelle par la
foi en Christ, c’est que nous ne vivions plus pour nous-mêmes. Dieu nous a
donné, dans la personne de Christ, un objet pour nos coeurs : « Celui qui
pour nous est mort et a été ressuscité ». Ne vaut-il pas la peine de vivre pour
cet homme-là ?
Nous avons vu, l’autre jour, quelle est l’attitude du monde d’un
côté, des chrétiens de l’autre, vis à-vis de ces trois choses : le péché,
la mort, et le jugement. Quand le pécheur est placé devant ces trois questions,
son état est absolument désespéré et il n’a rien à attendre qu’une misère
éternelle. Il en est tout autrement du chrétien : Où sont ses
péchés ? Disparus ! la question du péché ayant été réglée pour lui à
la croix, où Christ a été fait péché à notre place. S’agit-il de la mort, elle
est pour nous l’antichambre de la résurrection, ou mieux encore ! la mort
est comme un accident sur notre chemin, car c’est la résurrection qui est la
réalité
. L’apôtre savait ces choses : « Ô mort », dit-il, « où est ton
aiguillon ; ô sépulcre, où est ta victoire ? » La puissance de la mort
est aussi complètement abolie pour nous que la puissance du péché. Reste encore
le jugement : Le tribunal de Christ est une chose infiniment bénie pour le
chrétien qui sait que la grâce l’a suivi dès ses premiers pas, pour l’amener enfin
devant ce tribunal. Là, tout ce qu’il a fait, dans ses plus petits détails, est
placé comme un tableau devant les yeux des saints glorifiés, devant les yeux
des anges, devant les yeux de Dieu, devant les yeux de Christ. Dieu met tout en
pleine lumière, non pas pour nous faire porter le jugement de nos fautes, mais
pour glorifier sa grâce. Cependant il est une autre chose que nous n’avons
garde d’oublier : Notre conduite
dans
ce monde aura des effets éternels
quand
nous serons dans la gloire ; non pas pour notre condamnation, mais parce
que le tribunal de Christ est le lieu des couronnes et des récompenses.
L’apôtre savait, au bout de sa longue carrière, qu’il avait une récompense, car
il dit : « Désormais m’est réservée la couronne de justice, que le Seigneur,
juste juge, me donnera dans ce jour-là » (2 Tim. 4:8). Sans doute, nous ne
sommes pas appelés à servir le Seigneur comme des mercenaires, en vue d’une
récompense, mais à Lui être agréables dans toute notre conduite, en sorte que,
devant son tribunal, nous puissions entendre ces paroles de Sa bouche :
« Bien, bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton Seigneur », au lieu
d’entendre ces paroles : Tu as été infidèle ; je t’avais préparé une
couronne ; je ne puis te la donner ; je la donne à un autre, et toi,
tu en seras privé.
L’apôtre Paul était certain d’avoir une belle couronne de gloire : tous ceux qu’il avait amenés à Christ devaient la former. D’autres chrétiens qui ont vécu pour eux-mêmes, ou pour le monde, s’accommodant à ses pensées, à ses plans, à sa conduite, au lieu de songer aux âmes avec lesquelles le Seigneur les a mis en rapport, quelle couronne pourront-ils obtenir dans la gloire ? Aussi le Seigneur se sert-il de cette perspective pour nous encourager ou nous rendre sérieux. Ce n’est pas tout de savoir que le tribunal de Christ n’est pas un lieu de condamnation éternelle ; il est solennel de penser qu’à la fin de notre carrière terrestre, nous pourrions paraître devant le tribunal sans recevoir aucun témoignage de satisfaction de notre bien-aimé Sauveur au sujet de ce que nous avons fait pour Lui.
Après cette récapitulation, considérons le passage que nous
avons lu aujourd’hui : « Si nous sommes hors de nous-mêmes, c’est pour
Dieu ; si nous sommes de sens rassis, c’est pour vous » (v. 13). Je vous
étonnerai peut-être en disant que ceci devrait nous caractériser. Non pas que
nous soyons appelés à être « hors de nous-mêmes », comme l’apôtre Paul ;
Dieu lui donnait cet encouragement au milieu de sa carrière si laborieuse et
semée de tant de difficultés ; mais nous avons ici l’exemple d’un homme
chez lequel le moi, l’égoïsme du coeur
naturel
ne jouait aucun rôle.
Qu’il ait été en extase, ce n’était pas pour lui, mais pour Dieu ; qu’il ait été de sens rassis, ce n’était pas pour lui, mais pour ses enfants dans la foi. Ainsi la vie de l’apôtre était partagée entre Dieu qu’il pouvait visiter dans le ciel et ses chers Corinthiens, ne pensant qu’à eux, quand il était de sens rassis. Comment une chose pareille pouvait-elle avoir lieu ? L’amour de Christ l’étreignait et s’était emparé de lui. Telle était la cause et le ressort de toute cette vie. Mais deux motifs remplissaient le coeur de Paul quant à son attitude envers le monde. Quand il pensait au tribunal, il pensait d’abord aux hommes. Que leur adviendra-t-il, quand ils devront se présenter devant le trône du jugement ? Il savait combien le Seigneur doit être craint et quel effet la présence du Dieu juste et saint exercera sur les pécheurs. Alors il leur dit : Prenez garde au tribunal ! Mais il avait, d’autre part, à leur parler d’un amour qu’il connaissait fort bien, car il savait quel était l’amour de Christ à son égard.
Toute la fin de ce chapitre continue le grand sujet du
ministère. Dans les chapitres précédents, nous avons vu le ministère s’exerçant
par l’apôtre Paul en faveur du peuple de Dieu, mais tel n’est pas son seul
caractère. Ici, le ministère va au-dehors, vers le monde, et dit aux hommes ces
deux paroles : Prenez garde au jugement de Dieu ; c’est une chose
sérieuse et dont les conséquences sont éternelles. Ouvrez les yeux et les
oreilles pour voir et entendre ce qu’est l’amour de Christ. « L’amour du Christ
nous étreint ! » Ce n’était pas son amour
pour
Christ qui remplissait son coeur, mais
l’amour de Christ lui-même.
Mon amour pour Christ est un sentiment si
incomplet qu’il ne remplira jamais mon coeur. Plus nous avançons dans la vie
chrétienne, plus nous voyons combien est restreinte notre affection pour Lui,
comparée à son amour qui s’est montré à la croix, se montre chaque jour dans ses
soins de Berger et de Sacrificateur, et se montrera dans l’avenir quand il aura
son couronnement dans la gloire où nous serons avec Lui et tels que Lui pour
toujours.
« L’amour du Christ nous étreint, en ce que nous avons jugé ceci,
que si un est mort pour tous, tous donc sont morts ». Telle est, en un mot, la
base et comme l’assise de tout l’Évangile. Tous sont morts aux yeux de Dieu
(car, à nos propres yeux, nous ne le sommes jamais), et cela est prouvé par le
fait que le Seigneur Jésus est venu mourir pour tous. Il n’y a pas une
étincelle de la vie de Dieu dans le coeur de l’homme pécheur ; il est
mort. Mais Christ est venu se soumettre à la mort pour tous, et, en
ressuscitant d’entre les morts, il nous a frayé le chemin de la vie, nous
donnant sa propre place dans une vie nouvelle, dans une vie de résurrection,
« afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour Celui qui,
pour eux, est mort et a été ressuscité ». Permettez-moi de revenir sur cette
pensée qui nous a déjà occupés l’autre soir. Comment allons-nous désormais
passer notre vie nouvelle ici-bas ? Qu’en ferons-nous ? Remarquez,
chers amis, que nous trouvons ici la caractéristique
absolue du chrétien,
selon les pensées de Dieu. Ne plus vivre pour
soi-même, mais pour Christ ! L’homme pécheur peut-il faire cela ?
Jamais. Lisez en Osée 10:1 : « Israël est une vigne branchue ; il
porte du fruit pour lui-même
». Voilà l’homme. Dans un autre
passage, il est dit : « Vous chantez au son du luth, et inventez, comme
David, à votre usage,
des instruments
pour le chant » (Amos 6:5). Le prophète évoque David, le grand inventeur des
instruments pour accompagner les louanges de l’Éternel. L’homme peut inventer
aussi bien que David des instruments pour le chant, mais il s’en sert pour lui-même
.
Voulons-nous porter ce caractère ? Nos consciences ne nous disent-elles pas, qu’étant les objets d’un tel amour, nous devons tout sacrifier pour Christ et ne plus vivre désormais pour nous-mêmes ? N’est-il pas vrai que chacun de nous peut s’appliquer cette parole ? Si, parmi nous, j’exhorte mes frères et mes soeurs à le faire, soyez certains que je m’exhorte moi-même et ne me reconnais aucun droit quelconque de m’offrir en exemple à d’autres. Et cependant vous trouverez de tels exemples dans ce monde. Combien j’en connais, de chrétiens très simples et très dévoués auxquels Dieu a rendu témoignage qu’ils n’avaient pas vécu pour eux-mêmes, mais pour Celui qui pour eux est mort et a été ressuscité !
Il est bon que nous nous arrêtions un peu pour faire tous, sans exception, notre examen de conscience dans la lumière de la présence du Seigneur. Avons-nous compris dans quel but il est mort et ressuscité pour nous, dans quel but il nous a communiqué une vie nouvelle, capable d’aimer, de se dévouer, de Le servir ? Nous avons besoin qu’il nous y exhorte, car il sait fort bien ce que sont nos coeurs faibles et légers. N’oublions pas ces paroles : « Afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour Celui qui, pour eux, est mort et a été ressuscité ».
Comme nous l’avons fait remarquer, le chap. 5 nous présente un
nouveau côté du ministère, l’évangélisation
. Si quelque passage du Nouveau
Testament peut nous éclairer sur l’immense importance de la prédication de
l’Évangile, c’est bien ce passage-ci. Nous avons vu aussi que la question de la mort
est comme l’assise même de
l’Évangile. On ne peut annoncer un salut complet dans toute sa force et dans
toute sa puissance, sans présenter ce qui lui sert de point de départ, la mort
morale du pécheur perdu, et c’est en quoi l’évangélisation actuelle manque si
gravement. Si je parle de la grâce de Dieu en Christ, sans établir ce grand
fait, qu’aux yeux de
Dieu
l’homme
est entièrement mort dans ses fautes et dans ses péchés, j’affaiblis le ressort
de l’Évangile lui-même. On peut avoir reçu la vérité qu’on est un pécheur et
qu’on a besoin de pardon, tout en ayant un évangile très incomplet. Certes, je
ne dis pas qu’une âme ne soit sauvée de cette manière — toute âme qui a reçu le
pardon de ses péchés est sauvée — mais elle est encore loin de la réalité de
l’Évangile tel qu’il était prêché par l’apôtre Paul. Comme nous l’avons vu, si
la base de l’Évangile est la ruine
irrémédiable
de l’homme, la source de tout, c’est l’amour de Dieu en Christ.
L’apôtre connaissait cet amour
merveilleux et son âme l’avait saisi, compris de telle manière, qu’il était
pressé d’aller en parler aux hommes. Il joignait ensemble ces deux grandes
vérités de l’Évangile, la mort et l’amour : « Si un est mort pour tous,
tous donc sont morts ». La preuve était donnée qu’il n’y a dans l’âme d’aucun
pécheur aucune étincelle de la vie de Dieu, mais que Son amour a trouvé moyen
de nous substituer à tous un seul homme, venu pour se placer dans la position
où nous étions et en porter toutes les conséquences. Il est donc mort. Pour
qui ? Pour tous
. Son
amour l’a fait descendre là et se substituer à nous sous la sentence de mort.
Mais Dieu ne pouvait laisser dans la mort son Fils bien-aimé, auquel cette
oeuvre avait tout coûté, même sa propre vie. Alors, comme Dieu l’avait donné pour nous
, il le ressuscite pour
nous
: « Celui qui pour vous
est mort et a été ressuscité ».
Je sais maintenant que je possède une vie nouvelle, une vie de résurrection,
parce que Christ est ressuscité pour moi
, comme je sais que j’étais mort dans
mes fautes et dans mes péchés, parce que Christ est mort pour moi — non pas,
remarquez-le, que je me sente
mort ;
au contraire, je me sens très vivant — mais la vue de Christ m’a appris ce que
j’étais et ce que je suis devenu en vertu de son oeuvre. Telle est la substance
de l’Évangile. Il nous montre que l’amour de Dieu a placé son Fils bien-aimé là
où nous étions et que ce même amour a ressuscité notre Substitut, lui donnant
une vie de résurrection, afin que des êtres tels que nous puissent posséder
cette vie. Et maintenant l’apôtre ajoute : « Afin que ceux qui vivent ne
vivent plus pour eux-mêmes ». Nous avons déjà beaucoup insisté sur cette vérité.
Du moment que j’ai compris toute la valeur de l’oeuvre de Christ, je suis
introduit dans une sphère dont l’égoïsme est exclu. L’homme pécheur se fait toujours centre
. On l’a souvent comparé à une pierre
qu’on jette dans l’eau ; des cercles se forment autour d’elle, toujours
plus étendus, toujours plus éloignés, mais la pierre en reste le centre.
Lorsque, recevant une vie nouvelle j’ai été délivré de cet état, j’ai trouvé un
tout autre centre que moi-même, un objet qui est Christ
. C’est ce
qui caractérise, pour ainsi dire, s’il réalise son christianisme, le chrétien
idéal aux yeux de Dieu : un homme sorti de lui-même, ayant trouvé pour son
coeur un objet en dehors de lui, un autre centre, autour duquel toutes ses
pensées peuvent converger désormais. Dans l’épître aux Galates, l’apôtre
s’exprime ainsi : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi, et ce que
je vis dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu qui m’a
aimé et qui s’est livré lui-même pour moi ». Le chrétien a trouvé un objet digne
d’occuper tout son coeur, Jésus qui lui a révélé l’amour, et avec quelle joie
il est délivré de lui-même pour Lui appartenir !
Ces pensées sur lesquelles nous ne pouvons trop revenir nous
amènent aux versets que nous avons lus aujourd’hui : « En sorte que nous,
désormais, nous ne connaissons personne selon la chair ». Un changement complet
s’est opéré dans ma vie. Je suis introduit dans de toutes nouvelles relations,
ou, pour parler plus exactement, les relations dans lesquelles je me trouvais
ont pris un tout nouveau caractère. Le christianisme ne m’a pas sorti de mes
anciennes relations selon la nature
, entre enfant et père, entre mari et
femme, etc., mais elles ont entièrement changé
de caractère
, en sorte que
je puis dire : « Nous ne connaissons personne selon la chair ». Vous trouvez
dans l’épître aux Éphésiens : « Enfants, obéissez à vos parents dans le Seigneur
». C’est en cela que le caractère de la relation est autre. Il
est important que nous nous en rendions compte. Nos relations, non pas
seulement celles de famille, car il est tout simple que celles de la famille
chrétienne soient autres que celles de la famille mondaine ; — mais nos
relations journalières avec les hommes dans le monde ont complètement changé,
Comment les considérons-nous ? Pouvons-nous dire : « Je ne connais
personne selon la chair ? » Est-ce que les liens n’existent plus, tels
qu’ils étaient jadis, parce que nous ne les connaissons maintenant que dans la
lumière de Christ ? Et, quand nous avons affaire à nos amis d’autrefois,
disons-nous, comme l’apôtre : « L’amour de Christ nous étreint » ? Il
parle précisément dans ce passage de ses rapports avec les hommes. Ayant jugé
qu’ils sont morts, comme nous l’étions, nous pouvons leur présenter la vérité
de l’Évangile, par lequel nous avons reçu une vie nouvelle.
L’apôtre ajoute : « Si même nous avons connu Christ selon la
chair, maintenant nous ne le connaissons plus ainsi ». Remarquez ce mot « maintenant
». Auparavant, les disciples juifs
avaient connu Christ selon la chair. Il était le Messie, le Roi promis, venu
dans ce monde pour être présenté à son peuple selon la chair. Mais il avait été
rejeté et l’apôtre ne le connaissait plus comme objet de l’espérance juive. Il
en était de même pour ses relations avec ceux de sa nation, « ses parents selon
la chair », quoiqu’il ait aimé tendrement ce peuple, mais il ne les connaissait
plus ainsi. « En sorte que si quelqu’un est en Christ, c’est une nouvelle
création ». Être en Christ
: tout le secret du changement
qui s’est opéré est là
. Je ne suis plus en Adam, mais en Christ !
Une nouvelle création, fondée sur une vie toute nouvelle, par la résurrection
de Christ d’entre les morts : « Les choses vieilles sont passées ;
voici, toutes choses sont faites nouvelles ». Est-ce vraiment le cas pour nous
en pratique ? Est-ce que, dans toutes nos relations avec le monde qui nous
entoure, nous nous considérons comme n’étant pas dans la chair et comme
appartenant à un tout nouvel ordre de choses ? « Toutes choses sont faites
nouvelles » ; la scène dans laquelle je vis désormais n’est pas le monde.
Je suis dans le monde, mais je n’y appartiens pas ; je suis introduit dans
une autre scène ; ma vie n’est plus celle de l’ancienne création. Sans
doute, comme tous les hommes, j’ai mon intelligence, mon âme, mon activité sur
la terre, mais en Christ les choses vieilles sont passées ; le chrétien
n’est plus un homme animal, mais un homme spirituel. Nos affections, où
sont-elles ? Hélas ! chers amis, en pratique je montre la plupart du
temps que les choses vieilles ne sont pas passées, et cela m’humilie ;
mais je parle de la position
que Dieu
nous a donnée pour nous élever au-dessus des misérables pensées qui nous
rabaissent au niveau des choses terrestres. Nos pensées sont-elles aux choses
d’en haut ? Nos désirs n’ont-ils rien à faire avec les choses de la
terre ? Notre espérance est-elle tout entière dirigée vers le moment béni
où nous serons avec le Seigneur ? « Toutes choses sont faites nouvelles, et
toutes sont du Dieu qui nous a réconciliés avec lui-même par Jésus Christ ».
Nous devons être humiliés de voir que Dieu, nous ayant donné une telle
position, nous la connaissons à peine. L’apôtre, lui, pouvait dire : « Je
connais un homme en Christ » ; les choses vieilles sont passées, toutes
choses sont faites nouvelles. Ma vie n’appartient plus à ce monde ; mon
espérance n’a rien à faire avec les espérances terrestres, mais avec le ciel.
Il ajoute : « Toutes choses sont du Dieu qui nous a
réconciliés avec Lui-même par Jésus Christ ». Remarquez cette parole qui revient
si souvent dans ce passage et nous donne la signification la plus élevée du
contenu de l’Évangile : la réconciliation.
Ce n’est pas tout, avons-nous déjà dit, que d’avoir le pardon de ses péchés.
Une âme qui l’a reçu est
délivrée du poids qui pesait sur elle ; elle sait que le Sauveur a expié
ses péchés et que Dieu ne s’en souvient plus, mais ce n’est pas tout l’Évangile.
Dieu « l’a fait péché
pour nous, afin que nous
devinssions justice de Dieu en lui ». La délivrance du péché
est une chose infiniment heureuse et
bénie. Dieu me déclare juste, absolument juste, de sa propre justice, parce
qu’il me voit sans péché en Christ. Cela conduit à la réconciliation. Qui dit
réconciliation, dit des relations toutes nouvelles entre nous et Dieu. Le péché
nous avait éloignés de Lui ; il y avait séparation complète entre nous et
Lui. Maintenant Dieu a trouvé moyen d’abolir cette scission, de manière qu’il
n’y ait plus rien
qui nous
sépare. Dieu m’ayant justifié m’associe avec Lui. Prenez un exemple dans les
affaires. Un homme a trompé la confiance de son protecteur et l’a profondément
blessé et compromis. La faillite du coupable en est la conséquence. Le
protecteur examine les comptes, enregistre les faux… et paie les dettes. Il
pourrait dire : Je paie tes dettes, mais désormais je n’aurai plus de
relations avec toi. Au lieu de cela, il le justifie et le réhabilite et, pour
prouver l’étendue de cette réhabilitation, il l’associe avec lui.
Le coupable de jadis a désormais les mêmes
affaires, les mêmes intérêts, les mêmes relations que celui qu’il avait jadis
grièvement offensé. Il n’y a plus aucune différence entre eux, la communion est
complète. Telle est la grande oeuvre que Dieu a faite pour nous : le
résultat de l’oeuvre de Christ n’est pas seulement de nous acquérir le pardon
et de nous justifier, mais de nous réconcilier
avec Dieu,
de rétablir les relations que nous, coupables, nous avions rompues,
de nous donner les mêmes intérêts, les mêmes objets qu’à Dieu lui-même, de nous
associer à Lui, dès maintenant et pour l’éternité !
Ces relations ne pouvaient être rétablies que par Jésus
Christ : « Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, ne
leur imputant pas leurs fautes, et mettant en nous la parole de la
réconciliation » (v. 19). Tel était le caractère de Dieu quand Jésus s’est
présenté au milieu des hommes. Le monde n’a pas accepté cette invitation ;
au contraire, il s’est débarrassé de Celui dans lequel Dieu lui-même était,
pour réconcilier le monde avec Lui. —
Mais, en son absence, Dieu envoie des ambassadeurs dans la personne de ses
ministres : « Nous sommes donc ambassadeurs pour Christ — Dieu, pour ainsi
dire, exhortant par notre moyen ; nous supplions pour Christ : Soyez
réconciliés avec Dieu ! » (v. 20). Cette réconciliation n’est plus à faire,
comme quand Dieu était en Christ, dans ce monde ; elle est faite
; le fondement en est posé à la croix, où Celui qui n’a pas
connu le péché a été fait péché pour nous. Tel est le message de l’ambassadeur.
Vous pouvez venir maintenant en toute confiance : Soyez réconciliés avec
Dieu. Il a fait son propre Fils péché pour nous, afin que nous devinssions
justice de Dieu en Lui ! (Rom. 5:10, 11 ; Col. 1:21, 22).
Si nous avons été les objets d’un tel amour et d’une telle réconciliation, ne devons-nous pas aller auprès du monde pour l’annoncer ? Ce n’est pas seulement par les apôtres que cette bonne nouvelle a été proclamée dans ce monde ; les évangélistes la publient ; mais souvenons-nous bien que ce service incombe aussi à chacun de nous. Souvent Dieu amène sur notre chemin une seule âme pour qu’elle reçoive le message de la réconciliation. N’oublions pas que cette âme est destinée à faire partie de notre « couronne de gloire devant notre Seigneur Jésus, à sa venue » (1 Thess. 2:19).
Le chap. 5 nous a entretenus de l’évangélisation, un côté du ministère qui s’adresse à tous les hommes ; le passage du chap. 6 que nous venons de lire nous montre que ce même Évangile contient une exhortation toute particulière aux nations. C’est pourquoi l’apôtre dit : « Travaillant à cette même oeuvre, nous aussi, nous exhortons à ce que vous n’ayez pas reçu la grâce de Dieu en vain ». Ce passage, mal compris, embarrasse souvent les âmes. Les uns veulent y voir que le chrétien peut perdre son salut après l’avoir reçu ; d’autres cherchent à prouver que recevoir la grâce de Dieu en vain n’est pas la perte absolue de la grâce pour celui qui l’a reçue. Les uns comme les autres ont tort. De fait, « recevoir la grâce de Dieu en vain » ne peut signifier qu’une chose, c’est-à-dire perdre tout le bénéfice de cette grâce. Jamais Dieu n’affaiblit la responsabilité de l’homme et même du chrétien, ou ne l’atténue par la pensée de la grâce ; mais, d’autre part, la grâce seule peut nous sauver des conséquences de notre faillite quant à notre responsabilité. Dès le commencement de l’histoire de l’homme, ces deux principes sont maintenus parallèlement dans toute leur rigueur. Adam responsable, trouvé nu devant Dieu, meurt et subit la conséquence de sa désobéissance ; et la grâce revêt ce même Adam et l’introduit dans la vie, là où sa désobéissance l’avait introduit dans la mort.
Le passage suivant est une parenthèse : « Car il dit :
Au temps agréé je t’ai exaucé, et en un jour de salut je t’ai secouru. Voici,
c’est maintenant le temps agréable ; voici, c’est maintenant le jour du
salut » (v. 2). Ce passage est tiré du chap. 49 d’Ésaïe, dont les trois premiers
versets nous montrent Israël, sur lequel l’Éternel avait essayé de s’appuyer
comme sur son serviteur, complètement infidèle à ce que Dieu attendait de lui.
Alors, au v. 4, Christ, le serviteur fidèle, dit : « J’ai travaillé en
vain, j’ai consumé ma force pour le néant et en vain ». Le Seigneur est venu
remplacer Israël devant Dieu, mais ceux pour lesquels il était venu avaient
complètement manqué à la grâce qui leur avait été apportée dans Sa personne.
Ils avaient reçu la grâce de Dieu en vain
. Alors le Seigneur dit au v.
5 : « Quoique Israël ne soit pas rassemblé, je serai glorifié aux yeux de
l’Éternel, et mon Dieu sera ma force ». Dieu lui répond (v. 6) : « C’est peu
de chose que tu me sois serviteur pour rétablir les tribus de Jacob et pour
ramener les préservés d’Israël ; je te donnerai aussi pour être une
lumière des nations
, pour être mon salut jusqu’au bout de la terre ».
Ainsi son travail n’est pas perdu et le fruit en est porté jusqu’aux limites du
monde habitable. Mais même pour Israël ce travail ne sera pas perdu dans l’avenir.
Dieu dit à Christ, son serviteur : Je t’ai écouté et je t’ai
répondu : « En un temps agréé je t’ai répondu, et au jour du salut je t’ai
secouru » (v. 8). Tout ce que tu as fait pour Israël a été vain, mais je te
donnerai plus tard pour être une alliance du peuple, et, aux v. 9 à 13, il
décrit cette restauration merveilleuse.
Mais « voici », dit l’apôtre, « c’est maintenant
le temps agréable ; voici, c’est maintenant
le jour du salut » (6:2).
Maintenant tu es la lumière des nations. Quand on a vu cela, ce passage devient
très simple. L’apôtre exhorte les nations à ne pas faire comme Israël, à ne pas
recevoir la grâce de Dieu en vain. Faisant partie de ces nations, nous avons à
prendre garde comment nous recevons la grâce de Dieu, et nous avons à marcher
d’une manière qui soit en rapport avec elle. Cela faisait partie du ministère
de Paul.
Il montre ensuite que, quant à lui personnellement, il n’a pas
reçu la grâce de Dieu en vain (v. 3-10). Il se présente, comme son Maître, dans
le caractère d’un serviteur
de Dieu.
Au milieu des Juifs et des nations, il ne donnait « aucun scandale en rien, afin
que le service ne fût pas blâmé, mais en toutes choses il se recommandait comme
serviteur
de Dieu ». Il montre alors
quelles sont les qualités morales qui recommandent un serviteur. Pour savoir ce
que Dieu attend de nous, regardons à ce que l’apôtre Paul a été : « Par une
grande patience
». Une chose caractérise en tout
premier lieu le serviteur : la patience à tout supporter. « Dans les
tribulations, dans les nécessités, dans les détresses ». Ces trois mots ont
frappé d’autres que moi. Les tribulations sont des difficultés qui offrent plus
d’un chemin pour les traverser, mais tous ces chemins étant difficiles, nous
devons nous en remettre à Dieu pour qu’il nous enseigne celui que nous avons à
choisir. Les nécessités sont des difficultés qui n’offrent qu’un chemin pour en
sortir. Pourrons-nous le suivre sans y perdre la vie ? Aussi n’a-t-on
qu’une pensée, s’attendre au Seigneur. Les détresses sont les pires
difficultés. Ce mot « détresse » revient constamment dans les Psaumes et les
Prophètes, parce qu’il a une signification toute particulière, celle de la
« grande tribulation », de la « détresse de Jacob », que le Résidu juif aura à
traverser à la fin. Il n’y a point de
chemin pour en sortir
, aussi
le fidèle dit : « Jusques à quand ? » et sa confiance est en Dieu seul.
David avait subi les tribulations, les nécessités, la détresse, alors qu’il n’y
avait point de chemin pour lui, mais Dieu avait ouvert un chemin à son Oint,
devant Saül et devant Absalom. Comme David, l’apôtre avait aussi traversé
toutes ces choses avec une grande patience.
Nous trouvons ensuite « les coups, les prisons, les troubles, les
travaux, les veilles, les jeûnes ». À la fin de cette épître, nous apprenons
combien de fois Paul a traversé ces choses, dont le récit des Actes ne nous
donne pour ainsi dire qu’un spécimen, car Dieu ne nous a pas révélé tous les
détails de la vie de Paul, tout en nous donnant ce qui était nécessaire pour
nous présenter l’ensemble
de la
carrière de dévouement d’un ministre du Seigneur sur la terre. En cela aussi
l’apôtre suivait, quoique de loin, sans doute, l’exemple de son divin Maître,
dont le disciple bien-aimé disait : Si les autres choses que Jésus a
faites « étaient écrites une à une, je ne pense pas que le monde même pût
contenir les livres qui seraient écrits ».
« Par la pureté, par la connaissance, par la longanimité, par la
bonté, par l’Esprit Saint, par un amour sans hypocrisie, par la parole de la
vérité, par la puissance de Dieu, par les armes de justice de la main droite et
de la main gauche » (v. 6, 7). De telles choses ne pouvaient pas manquer à ce
ministère : l’Esprit Saint, un amour sans hypocrisie, la parole de la vérité
!
Qu’il nous soit donné de saisir cela ! Par sa grâce, Dieu nous a
attachés à sa Parole et nous a convaincus que, sans elle, nous ne pouvons faire
un pas, mais comprenons bien que la Parole de
la vérité
est à la base de toute notre vie chrétienne ; non pas
seulement la parole de Dieu,
mais la
Parole dans laquelle la pensée de Dieu
est entièrement révélée,
et c’était elle que l’apôtre prenait en main pour
faire l’oeuvre de Dieu dans ce monde. Or cette oeuvre est un combat
; aussi l’apôtre ajoute : « par la puissance de Dieu, par
les armes de justice de la main droite et de la main gauche ». Vous savez ce que
sont les armes de la main droite : la parole de Dieu ; et les armes
de la main gauche : le bouclier de la foi. Nous avons d’un côté à
combattre par la Parole, de l’autre, à résister à l’Ennemi. Ces armes sont des
armes de justice,
car la Parole n’est
efficace que lorsque nous la présentons portant nous-mêmes un caractère de justice pratique,
et ce n’est qu’armés
de cette justice que nous pouvons détourner les dards enflammés du méchant. Un
chrétien a tout pouvoir pour résister, tout pouvoir pour combattre dans ce
monde, mais il faut pour vaincre qu’il se garde du péché dans ses voies. C’est
ce que dit la brebis au Ps. 23, non pas, sans doute, quant au combat, comme
ici, mais quant à la marche « Il me conduit dans des sentiers de justice,
à cause de son nom ». Si nous
suivons le chemin de Christ, jamais nous ne trouverons le péché sous nos pas,
et nous ne le rencontrerons que pour le combattre. Le Seigneur lui-même en est
pour nous le parfait modèle.
« Comme séducteurs, et véritables ; comme inconnus, et bien
connus ». Ces paroles me font penser à la vie d’un frère que nous avons
hautement estimé pour ses dons et sa piété. Il avait réalisé ces paroles en
marchant sur les traces de l’apôtre. Accusé par les hommes d’être un faux
docteur et un séducteur, il était véritable aux yeux de Dieu. Son nom était un
opprobre pour ceux qui le prononçaient, et tous faisaient autour de lui la
conjuration du silence ; ils le traitaient en inconnu, mais pour Dieu il
était bien connu. C’est ce que nous avons à chercher pour nous-mêmes. Si, ne
pensant pas à nous-mêmes, nous marchons dans ce monde comme serviteurs de
Christ, peu importe que le monde ne nous connaisse pas ; Dieu nous
connaît. Notre chemin est très simple, car nous
n’avons à regarder que d’un côté.
Que nous importe d’être inconnus du
monde, si Dieu dit de nous comme il disait d’Abraham : « Je le connais ».
« Comme mourants, et voici, nous vivons ; comme châtiés, et
non mis à mort ; comme attristés, mais toujours joyeux ; comme
pauvres, mais enrichissant plusieurs ; comme n’ayant rien, et possédant
toutes choses » (v. 9, 10). Il était toujours mourant, sous la sentence de la
mort de la part du monde, et voici, Dieu le maintenait en vie. Il était châtié,
et Dieu se servait de la verge, dans la main du monde, pour la prospérité
morale de son apôtre bien-aimé. Dieu arrêtait à temps, comme dans le cas de
Job, la main de Satan qui aurait voulu le mettre à mort pour se débarrasser de
son témoignage. Il était attristé, mais avait le coeur rempli de joie, parce
que ses yeux ne s’arrêtaient pas aux circonstances, mais étaient fixés sur la
personne de Christ. Il était pauvre, mais enrichissant plusieurs ; il
n’avait rien, mais possédait toutes choses. Tels sont les derniers traits de ce
tableau. De qui sont-ils l’image ? De Paul, sans doute, mais de Paul se modelant sur son Maître.
Qui, mieux
que Celui-ci, était pauvre, mais enrichissait plusieurs ? Il est dit de
Lui, qu’il s’est appauvri afin de nous enrichir. N’ayant rien et possédant
toutes choses : n’est-ce pas encore Lui ? Il n’avait rien dans ce
monde ; s’il s’agissait de payer les didrachmes il ne les avait pas, et
cependant toutes choses étaient à Lui et il en disposait en faveur de tous.
Ainsi, d’un bout à l’autre de sa longue carrière, l’apôtre arrivait à reproduire les caractères de son Sauveur et il était parfaitement heureux ; car, quoique n’ayant rien trouvé dans ce monde, il était entré en possession d’un objet, devenu son unique Modèle, et sur lequel se concentraient toutes ses affections.
Méditons souvent ce passage, car il vaut bien la peine pour nous d’accomplir le service que le Seigneur nous a confié. Demandons-lui avec instance de pouvoir porter ces caractères. Ils sont réalisables et l’exemple de Paul est destiné à nous le prouver et à nous empêcher de perdre courage en considérant l’excellence du service, tel qu’il a été accompli par notre Seigneur et Maître, le parfait Serviteur.
Toute la question est celle-ci : Quelle place le Seigneur
occupe-t-il dans mon coeur et dans mes pensées ? S’il occupe toute
la place, je serai capable de
l’honorer en le suivant.
C’est ici que se termine la première partie de cette épître. La seconde contient des exhortations tout aussi importantes pour notre vie pratique.
Le verset 11, par lequel commence notre lecture d’aujourd’hui,
se relie, pour ainsi dire, au verset 1, où l’apôtre exhorte les Corinthiens à
n’avoir pas reçu la grâce de Dieu en vain. Le résultat pratique de la réception
de la grâce se résume en un seul mot : la sainteté.
En effet, la sainteté pratique comprend toute
la vie chrétienne, comme
témoignage dans ce monde. À la Pâque, les Israélites étaient mis à l’abri du
jugement de Dieu par le sang de l’agneau. Un autre type de la mort de Christ
nous est donné à la mer Rouge où le peuple n’est pas seulement mis à l’abri du
jugement, mais amené à Dieu. Mais, dès qu’ils eurent offert la Pâque, les
Israélites n’avaient plus qu’une seule
chose
à faire : la Fête
, qui était la célébration de la Fête des pains sans levain,
type d’une vie de sainteté pratique, partant du sacrifice et continuant sans
interruption pendant sept
jours. Le
nombre sept est le chiffre de la plénitude, image du cours complet
de notre vie ici-bas.
Il est important pour nous de comprendre en quoi consiste dans
ce passage l’exhortation de l’apôtre à la sainteté. La sainteté pratique a
trois caractères : le premier est la sainteté quant à nos associations
avec le monde ; le deuxième, la sainteté quant à nos associations
religieuses ; le troisième, la sainteté individuelle. Si nous avons bien
compris ces trois points, nous trouvons que la sainteté pratique pénètre, pour
ainsi dire, toute notre vie chrétienne. Le 19° chapitre du Lévitique, v. 19, nous les montre clairement. 1°
« Tu n’accoupleras pas, parmi ton bétail, deux espèces différentes ». C’est
l’association avec le monde, dont il est parlé dans notre passage aux v. 14 et
15. 2° « Tu ne sèmeras pas ton champ de deux espèces de semences ». C’est le type
de l’association religieuse dont il est parlé au v. 16. Nous ne pouvons
employer des semences diverses dans le champ de Dieu ; il faut que nous
semions une semence unique. 3° « Tu ne mettras pas sur toi
un vêtement d’un tissu mélangé de deux
espèces de fil ». C’est le type de la sainteté individuelle dont il est parlé au
chap. 7:1.
Comme nous venons de le dire, nous trouvons ces trois points
dans notre chapitre. Mais l’apôtre dit, avant de les aborder : « Notre
bouche est ouverte pour vous, ô Corinthiens ! notre coeur s’est élargi ».
Il avait vu les fruits de l’Esprit produits chez eux à la suite de sa première
épître et, au lieu d’avoir ses sentiments refoulés dans son coeur, il était
maintenant en liberté à leur égard. Il ajoute : Que votre coeur
s’élargisse aussi. En quoi devait-il s’élargir ? Il fallait désormais que leur
marche soit une marche sainte.
D’abord (v. 14), ils ne devaient pas se mettre « sous un joug mal
assorti avec les incrédules ». C’est une allusion à ce que nous avons lu dans le
Lévitique. « Car quelle participation y a-t-il entre la justice et l’iniquité ? »
Il n’y a pas un seul trait d’union entre le monde et les enfants de Dieu. Ce
sont deux espèces différentes ; or, quoi qu’en disent les savants, il n’y
a jamais eu dans le monde de transformation des espèces. Combien cette parole
est de saison pour le temps présent ! Lorsque le témoignage actuel de Dieu
commença à être connu au milieu de nous, n’y avait-il pas une séparation
beaucoup plus complète d’avec le monde ? Dans quelle mesure sommes-nous
restés fidèles à ce témoignage ? Est-ce que, faire des affaires avec le
monde, l’employer pour ses propres affaires, ne caractérise pas beaucoup
d’entre nous, chrétiens, surtout parmi les jeunes ? S’il y avait plus de
fidélité, je ne doute pas que cette parole de l’apôtre produirait les mêmes
fruits qu’elle produisait autrefois. Nous avons à courber la tête avec
humiliation, en pensant que cela se réalise si peu parmi les générations
nouvelles. « Quelle participation y a-t-il entre la justice et l’iniquité ?
ou quelle communion entre la lumière et les ténèbres ? et quel accord de
Christ avec Bélial ? » C’est un contraste tout du long, une opposition
absolue entre l’élément chrétien et l’élément du monde. Du côté chrétien est la lumière.
Ce n’est pas seulement que
la lumière a lui sur nous, mais il nous est dit : « Vous êtes lumière dans
le Seigneur ». Si lui-même est « la lumière du monde », ses disciples, en son
absence, sont aussi « la lumière du monde » (Éph. 5:8 ; Jean 9:5 ;
Matt. 5:14). Qu’est-ce que les ténèbres ont fait de la lumière ? Si dans
une chambre complètement noire vous allumez une simple allumette, vous dissipez
les ténèbres dans une mesure ; mais, au point de vue moral, lorsque la
lumière du monde vint ici-bas, les ténèbres ne l’ont pas comprise ou saisie, et
n’ont été en aucune manière imprégnées par elle. Cela fait ressortir l’état
incurable de l’homme, et cet état reste aujourd’hui le même en présence de ceux
qui sont la lumière du monde depuis le départ de leur Sauveur.
« Quel accord de Christ avec Bélial, ou quelle part a le croyant avec l’incrédule ? » (v. 15). Comme cela atteint nos consciences ! Il y a Christ d’un côté, le diable de l’autre. Peut-il y avoir un accord entre les deux, entre l’Ennemi de Christ et ceux qui représentent Christ dans ce monde ? Il y a la foi d’un côté, et l’incrédulité de l’autre, et aucun point de contact possible entre ces deux pôles contraires.
L’apôtre passe maintenant à la seconde question, mentionnée en
type au chap. 19 du Lévitique : « Quelle convenance y a-t-il entre le
temple de Dieu et les idoles ? Car vous êtes le temple du Dieu vivant » (v.
16). Chose inouïe, n’est-ce pas, que nous, chrétiens, l’Assemblée de Dieu, nous
soyons le temple du Dieu vivant ! Au chap. 26 du Lévitique, Dieu
dit : « Si
vous gardez mes commandements … je mettrai mon
tabernacle au milieu de vous … et je marcherai au milieu de vous ; et je
serai votre Dieu, et vous serez mon peuple » (v. 3, 11, 12) ; c’est-à-dire
qu’il fait dépendre de leur conduite le fait qu’ils seront le lieu où Dieu
habite. Pour nous, c’est le contraire ! Nous sommes ce temple, en vertu du
don du Saint Esprit, et c’est parce que nous le sommes que nous sommes appelés
à être saints
, pratiquement séparés pour Dieu dans ce monde. Ne nous
associons en aucune manière avec la religion du monde qui nous entoure. Ce
principe n’a pas changé depuis que l’idolâtrie a disparu du monde chrétien,
l’éloignement de Dieu n’ayant fait que revêtir une forme moins grossière ;
mais s’y associer serait perdre le vrai caractère de peuple de Dieu. « C’est
pourquoi sortez du milieu d’eux, et soyez séparés, dit le Seigneur, et ne
touchez pas à ce qui est impur, et moi, je vous recevrai » (v. 17). C’est une
citation du chap. 52 d’Ésaïe. Il s’agit là, pour le peuple de Dieu, qui va être
introduit dans la terre promise, de sortir de toute association avec Babylone,
mère de l’idolâtrie, afin d’avoir part aux bénédictions de la terre d’Israël.
Pour nous, la séparation a lieu aujourd’hui d’avec « la grande Babylone », la
chrétienté apostate, pour entrer dans notre Canaan céleste. La séparation est à
la base même du témoignage chrétien, mais il ne suffit pas de dire : « la
séparation », car il peut y en avoir une très mauvaise. La sainteté consiste
dans la séparation pour Dieu
, et pas pour autre chose. Voilà ce qui nous
sépare de la religion du monde ; notre sainteté est pour Dieu
. Une
très grande bénédiction s’y rattache. Il dit : « Je vous serai pour Père,
et vous, vous me serez pour fils et pour filles, dit le Seigneur, le
Tout-Puissant » (v. 18). Cela ne signifie pas que, si nous ne sortons pas du
milieu d’eux, nous ne soyons pas des enfants de Dieu, mais la jouissance
des relations de famille avec le Père, comme pour Israël celle des rapports
avec l’Éternel et le Tout-Puissant, provient du degré de notre séparation pour
Dieu. Si, pareil à la famille de Kéhath, nous sommes employés à porter les
ustensiles du sanctuaire, pouvons-nous associer le monde avec nous, pour le
faire ? Aurait-il jamais été permis à un étranger de porter l’arche et le
propitiatoire, l’encensoir, le chandelier, l’autel d’or ou l’autel d’airain lui-même ?
Personne ne pouvait toucher à ces choses s’il ne faisait pas partie de la tribu
de Lévi, à laquelle étaient attribuées ces fonctions saintes en Israël.
Ayant dit ces choses, l’apôtre arrive à la sainteté
individuelle
, au vêtement d’un tissu mélangé, de Lév. 19. C’est une chose
très sérieuse à considérer : « Ayant donc ces promesses, bien-aimés,
purifions-nous nous-mêmes
de toute
souillure de chair et d’esprit, achevant la sainteté dans la crainte de Dieu »
(7:1). Je pense que ces deux mots, « souillure de chair et d’esprit », indiquent
d’un côté la sainteté quant à la conduite individuelle, telle qu’elle se montre
au-dehors dans notre marche, et de l’autre, la sainteté quant à l’état de nos
propres coeurs. On peut être séparé de la souillure quant à son témoignage
extérieur, de manière à être en apparence irréprochable, mais si quelqu’un
pouvait voir dans nos coeurs, combien de choses contraires à la pureté n’y
découvrirait-il pas ? Nous avons à mettre d’accord ces deux côtés de notre
sanctification personnelle, à tenir égaux ces deux plateaux de la balance.
Comme individus, notre marche extérieure, nos actes et nos paroles, doivent
correspondre à ce qu’il y a dans nos coeurs, afin que nous puissions répéter,
avec notre Sauveur bien-aimé : « Ma pensée ne va pas au-delà de ma parole »
(Ps. 17:3).
Si les trois caractères de sainteté pratique que nous venons d’énumérer se trouvent chez les enfants de Dieu, c’est la preuve qu’ils ont été attentifs aux exhortations de la Parole. Marcher contrairement à ces principes, c’est avoir reçu la grâce de Dieu en vain.
Que Dieu nous donne à tous d’avoir, dans nos vies chrétiennes, beaucoup plus de réalité que nous n’en avons. Qu’il nous donne, quant à nous-mêmes, un esprit d’humiliation et de repentance pour que nous devenions des témoins plus fidèles de Celui dont la grâce a tout fait pour nous, et qui nous a délivrés du pouvoir des ténèbres et nous a introduits dans le royaume du Fils de son amour !
Le chapitre 6 nous a montré ce qui caractérisait l’apôtre comme
ministre de Christ. Au chapitre 7, nous ne retrouvons pas ces caractères, mais,
si possible, quelque chose de plus précieux encore : nous trouvons le coeur
de l’apôtre. C’est ce qui lui
fait dire, au v. 3 : « Je ne dis pas ceci pour vous condamner, car j’ai
déjà dit que vous êtes dans nos coeurs à
mourir ensemble et à vivre ensemble
».
Son coeur allait tout entier au-devant de ses enfants dans la foi. Eux
étaient à l’étroit dans leurs propres coeurs, comme il est dit au chapitre
précédent : ils ne les avaient pas assez larges pour contenir tout l’amour
qui leur était témoigné Par l’apôtre, tandis que lui représentait cet amour en
pratique, au milieu d’eux. Son coeur si large à leur égard désirait réveiller
leurs coeurs en sorte qu’ils n’aient ensemble qu’une pensée, un but, un
sentier, un objet. L’apôtre, lui, n’avait qu’un seul objet, comme on le voit
dans l’épître aux Philippiens. Il faisait, ne désirait qu’une seule chose. Il
veut maintenant, par son ministère, garder les Corinthiens, non seulement dans
le chemin de la sainteté, comme au chap. 6, mais dans le chemin de l’amour
,
d’un amour qui lie les enfants de Dieu les uns aux autres et les lie tous
ensemble à Christ. Comme il était peu estimé, cet apôtre bien-aimé, par ses
enfants dans la foi ! Lui qui débordait d’amour, était obligé de leur
dire : « Recevez-nous : nous n’avons fait tort à personne, nous
n’avons ruiné personne, nous ne nous sommes enrichis aux dépens de personne »
(v. 2). Dans quel état se trouvaient-ils donc, alors que, dans cette épître,
nous les trouvons déjà restaurés, pour que des choses pareilles doivent leur
être dites ! C’est qu’il y avait des gens parmi eux qui cherchaient à
déprécier l’apôtre, en leur représentant qu’il était un homme intéressé, lui
qui, après avoir tout laissé pour les servir, suivait si fidèlement la trace de
son Seigneur et Sauveur, en n’ayant rien
. Il ajoute : « Je ne dis
pas ceci pour vous condamner » ; ne pensez pas que je vienne vers vous avec
la verge. Si une autorité lui était confiée dans l’Église de Christ, il n’en
usait pas ici, parce que l’exhortation de la première épître avait commencé à
porter ses fruits. Aussi, loin de se servir contre eux de l’autorité qui lui
était confiée, il leur ouvre son coeur et déploie à leurs yeux toute
l’affection qu’il avait pour eux, ses enfants dans la foi. Il se glorifiait
d’eux auprès de Tite, et il est heureux que Tite ait trouvé les choses comme il
les lui avait fait espérer. Il leur avait écrit sa première épître
inspirée ; n’étant plus sous cette influence, il pouvait en avoir éprouvé
du regret ; maintenant, il ne regrettait plus rien. Il leur dit : Mon
coeur a trouvé parmi vous quelque chose qui répond à mon affection !
Après les avoir exhortés à la sainteté, il cherche à lier leurs
coeurs ensemble, afin qu’ils puissent être en communion avec lui, l’apôtre, et
avec le Seigneur Jésus dont il était le représentant. Mais il met en avant une
autre chose : son ministère avait produit des fruits : « Quelles
excuses, quelle indignation, quelle crainte, quel ardent désir, quel zèle,
quelle vengeance ! À tous égards vous avez montré que vous êtes purs dans
l’affaire » (v. 11). En lisant ce passage, on pourrait se demander :
Pourquoi donc l’apôtre s’était-il montré si sévère envers les Corinthiens,
puisqu’il était démontré maintenant qu’ils n’avaient trempé en rien dans le
péché odieux qui s’était produit parmi eux ? C’est que, malgré cette
non-culpabilité relative, ils avaient grand besoin de repentance. Il dit au v.
10 : « La tristesse qui est selon Dieu opère une repentance à salut dont on
n’a pas de regret ». Quelle repentance, s’ils n’étaient pas complices de l’acte
criminel, et avaient montré qu’ils étaient purs dans cette affaire ? Que
s’était-il donc passé ? La première épître leur avait prouvé qu’au lieu
d’être des chrétiens spirituels, ils étaient des chrétiens charnels, restés à
l’état de petits enfants en Christ ! Les motifs de leur activité n’étaient
pas autre chose que la satisfaction de leur orgueil ; ils se servaient de
leurs dons pour s’exalter eux-mêmes. Tel était l’état de cette brillante
assemblée de Corinthe, où l’on ne pouvait entrer, sans dire : « Dieu est
véritablement parmi vous ! » Mais quand, devant la parole de l’apôtre, ils
font un retour sur eux-mêmes, ils sont plongés dans la tristesse, se demandant
comment ils ont pu laisser se développer au milieu d’eux un mal aussi
scandaleux. Ah ! disent-ils, nous étions loin de Dieu dans nos pensées,
sans communion réelle avec Lui ; nous recherchions beaucoup de
connaissance, la solution de toutes sortes de questions intellectuelles, les
signes extérieurs de force et de puissance qui exaltent l’homme, mais notre conscience
n’était pas en jeu dans ces choses !
Chers amis, cela est très important pour nous tous. Quand nous voyons un mal se produire dans l’assemblée, nous sommes instruits à ôter promptement « le méchant du milieu de nous-mêmes », mais nous arrêtons-nous à cela, et n’allons-nous pas plus loin ? Cette affaire devrait atteindre nos consciences. La production d’un mal quelconque, dans une assemblée de Dieu, provient non seulement de l’individu qui a fait le mal, mais de l’assemblée qui était dans un état non jugé. Quand le mal éclate, soyons-en certains, il n’y a pas seulement un coupable, mais c’est l’assemblée de Dieu qui est le coupable.
Les Corinthiens ne s’étaient pas bornés à la tristesse :
« La tristesse qui est selon Dieu opère une repentance
à salut dont on
n’a pas de regret ». C’est un jugement complet de soi-même en la présence de
Dieu. Quand l’apôtre leur écrivait ces lignes, toute idée de se faire valoir
avait disparu au milieu des larmes qu’ils avaient dû verser ; toutes les
questions d’intelligence qui les avaient tant occupés étaient laissées de
côté ; la repentance était produite.
La fin de ce chapitre nous montre un troisième résultat du
ministère de l’apôtre envers les Corinthiens : le premier était de lier
leurs coeurs dans l’amour fraternel avec celui de Paul ; le deuxième de
produire une repentance à salut ; nous trouvons le troisième dans les
derniers versets de ce chapitre : « L’affection de Tite se portait plus
abondamment sur eux, quand il se souvenait de l’obéissance
d’eux tous,
comment ils l’avaient reçu avec crainte et tremblement » (v. 15). Ainsi le
ministère selon Dieu, s’exerçant au milieu des chrétiens, s’il les pousse au
jugement d’eux-mêmes, les pousse aussi à l’obéissance
. Un chrétien
désobéissant ne peut s’attendre qu’à la discipline ou au jugement de Dieu. Il
en est de même pour une assemblée
désobéissante ; l’apôtre dit
ici : « l’obéissance de vous tous ». Pas un n’était excepté. Ils avaient
gagné à cette discipline l’amour, la repentance et l’obéissance. Ils étaient
maintenant unanimes quant à la voie dans laquelle ils avaient à marcher pour
servir le Seigneur et le glorifier. L’apôtre ajoute : « Comment vous l’avez
reçu avec crainte et tremblement ». Ce mot revient souvent dans l’Ancien et le
Nouveau Testament et désigne toujours la complète
défiance de soi-même
. Dans
la première épître, Paul leur dit comment il avait été parmi eux « dans la
faiblesse, et dans la crainte, et dans un grand tremblement » (2:3). La crainte
n’est pas la peur, mais le sentiment qu’il n’y a en nous aucune force pour
faire l’oeuvre de Dieu. Il avait fallu la verge pour que les Corinthiens
apprennent à réaliser ce que, dès le début de son ministère parmi eux, l’apôtre
en personne leur avait enseigné. En Phil. 2:12, il est dit : « Travaillez à
votre propre salut avec crainte et tremblement ». Pour arriver au salut, à la
victoire finale, les Philippiens devaient travailler sans aucune confiance en
eux-mêmes et avec le sentiment de la terrible puissance qui s’opposait à leur
travail. En Éph. 6:5, les esclaves doivent obéir à leurs « maîtres selon la
chair avec crainte et tremblement » avec une pleine défiance d’eux-mêmes qui
implique une pleine confiance en Dieu et dans les ressources de sa grâce. C’est
en effet à cela qu’aboutit toujours pour le chrétien la défiance de
lui-même ; il s’appuie sur Celui en qui est la force, qui ne change
jamais, qui se tiendra jusqu’au bout à ses côtés et lui fera atteindre le salut
final dont le couronnement est la gloire.
Nous avons vu que les Corinthiens avaient reçu les exhortations
qui leur étaient adressées dans la première épître. Un grand zèle s’était
produit chez eux pour la sainteté du nom de Christ et ils avaient été restaurés
par la repentance, quoiqu’il y ait encore chez eux bien des choses à reprendre.
Quand une assemblée est en bon état, il ne faut pas penser que la limite
atteinte ne puisse pas être dépassée. Nous avons toujours à faire des progrès
en zèle et en affection pour Christ, en dévouement pour l’Évangile, en amour
les uns pour les autres. Nous trouvons ici un autre caractère du ministère,
moins remarqué peut-être, mais tout aussi précieux que ceux dont cette épître
nous a entretenus jusqu’ici. Il a en vue les besoins matériels
des saints. Cela est dit au v. 4 : « La grâce
et la communion de ce service (ou ministère) envers les saints ». Ce service
consistait, comme nous le voyons, en aumônes, en dons d’argent, destinés à la
subsistance des frères à Jérusalem qui étaient dans une grande misère, car ils
avaient contre eux non seulement les puissances persécutrices du monde, mais
aussi celles de leur propre nation, ennemie de Christ et des saints. Dans sa
première épître, l’apôtre avait engagé les Corinthiens à mettre de côté ce qui
était nécessaire pour ce service (1 Cor. 16:1), et c’est à cette collecte qu’il
est fait allusion ici. Nous la trouvons encore mentionnée au chap. 15:25, 26 de
l’épître aux Romains. L’apôtre était sur le point de monter à Jérusalem pour
porter aux frères les dons des assemblées des gentils. Les saints de la
Macédoine, où se trouvait l’apôtre quand il écrivait cette épître, avaient fait
tout leur possible, donnant même au-delà de leur pouvoir. Ces assemblées de
Macédoine étaient cruellement persécutées et avaient perdu leurs biens, mais il
y avait parmi elles beaucoup d’amour, et rien ne les arrêtait quand il
s’agissait de contribuer au soulagement des frères. Les Corinthiens avaient
déjà, depuis une année, commencé leur collecte, mais leur zèle s’était ralenti.
Ces riches Corinthiens n’avaient pas été à la hauteur des pauvres Macédoniens.
C’est ce que l’on rencontre parfois. Où il y a prospérité parmi les saints, des
fortunes dont on peut disposer, on trouve moins de libéralité relative que dans
les milieux pauvres, et j’en suis souvent frappé. Cela provient de ce que, dans
la prospérité, les coeurs se dessèchent, s’occupent des choses de la terre.
Lorsque cette prospérité n’existe pas, les coeurs sont beaucoup plus portés
vers le service du Seigneur. Tout en traitant les Corinthiens avec une douceur
infinie, l’apôtre cherche à activer leur zèle, en leur montrant comment le
Seigneur agit dans les assemblées de Macédoine. Ce service est très précieux,
quand il est rendu réellement dans une pensée d’amour, et il contient peut-être
plus de bénédictions que le ministère de la Parole, même exercé par des dons
éminents ; aussi le Seigneur Jésus y est attentif. Les assemblées de
Macédoine demandaient à l’apôtre avec de grandes instances, comme une grâce,
de pouvoir manifester
leur amour envers les saints de Jérusalem (v. 4). C’était leur manière de
considérer la question et ils insistaient tous, d’un commun accord, pour que
cette grâce leur soit accordée
. Avons-nous l’habitude de considérer
une collecte pour les saints comme une grâce ? Ils demandaient aussi à
Paul, quoiqu’il soit apôtre, d’être lui-même l’instrument de ce ministère. Paul
accepte ; le grand apôtre des gentils consent à porter lui-même les sommes
d’argent qui lui seront confiées. Ce n’était pas une petite chose, en ce
temps-là, de se charger d’un tel fardeau, et l’apôtre veillait, en outre,
scrupuleusement sur son dépôt. La gloire de Christ était impliquée pour lui
dans l’administration de ce trésor.
En apparence ce ministère a précipité l’apôtre dans les plus grandes difficultés, car il fut l’occasion de sa captivité. Au chap. 24 des Actes, il dit à Félix : « Or, après plusieurs années, je suis venu pour faire des aumônes à ma nation » (v. 17). Tel était le but ; le résultat fut que Paul manqua être massacré par les Juifs, fut fait prisonnier, passa des années en captivité, fut transporté à Rome, lié de chaînes, et finalement termina sa carrière comme martyr ; mais Dieu sut se servir de toutes ces circonstances pour nous donner une partie de cette Parole dont nous tenons tant d’instructions précieuses.
L’apôtre dit ici : « Mais, comme vous abondez en toutes
choses : en foi, et en parole, et en connaissance, et en toute diligence,
et dans votre amour envers nous — que vous abondiez aussi dans cette grâce » (v.
7). Ce passage est frappant : dans la première épître aux Corinthiens, il
rendait grâces à Dieu pour les choses dont il reparle ici : la parole, la
connaissance, qui caractérisaient alors les saints de Corinthe, quoiqu’ils aient
été dans un état déplorable quant à leur conduite chrétienne. Maintenant ces
mêmes choses subsistaient encore, mais la repentance avait apporté dans ce
milieu un élément nouveau, l’amour.
Quelque
comblés qu’ils aient été de richesses spirituelles, dans la première épître,
ils n’abondaient pas en amour
; leurs coeurs étaient
rétrécis ; le monde s’en était emparé. Maintenant l’amour remplaçait la
culture du moi. Ils avaient sans doute beaucoup plus besoin d’être exhortés que
les pauvres Macédoniens, mais la sincérité de leur amour étant mise à
l’épreuve, ils étaient disposés à répondre à ce que le coeur de l’apôtre
attendait d’eux. Il leur avait envoyé Tite, dans la crainte que ses chers
Corinthiens ne soient en mauvaise posture vis-à-vis de leurs frères en Macédoine :
« Si des Macédoniens viennent avec moi, vous trouveront-ils prêts ? » Tous
ces préparatifs, le voyage de Tite — car passer de Macédoine en Achaïe était
une grosse affaire en ce temps-là — la visite de Paul qui devait y faire suite,
l’accompagnement par les frères de Macédoine, tout cela semble hors de
proportion avec son but : Un simple secours d’argent ; mais il
s’agissait de manifester pratiquement l’amour
de Christ,
et pouvait-il y avoir un but plus élevé que celui-là ?
Au v. 18, il ajoute : « Et nous avons envoyé avec lui le
frère dont la louange dans l’évangile est répandue dans toutes les assemblées ».
Comment s’appelait-il ? Nous ne le savons pas. Et plus loin, au v.
22 : « Nous avons envoyé avec eux notre frère, du zèle duquel, en plusieurs
choses, nous avons souvent fait l’épreuve, et qui maintenant est beaucoup plus
zélé à cause de la grande confiance qu’il a en vous ». Voici donc deux frères
dont le zèle est nommé (tandis que Tite qu’ils accompagnent nous est connu de
tant de manières) et dont le nom n’est pas même prononcé. Est-ce tout ?
Non, remarquez-le bien : « Quant à Tite, il est mon associé et mon
compagnon d’oeuvre auprès de vous ; quant à nos frères (les deux dont il
vient de parler), ils sont les envoyés des assemblées, la gloire de Christ
» (v.
23). Cela ne vaut-il pas mieux que de nous conserver leurs noms ?
Ils sont la gloire de Christ
! Oh ! chers amis, j’aimerais
beaucoup mieux n’avoir aucun nom parmi les hommes, mais qu’il soit dit de
moi : « Il est la gloire de Christ ! » C’est ce que produit toute
marche fidèle. Vivant au service des autres pour l’amour de Christ, exerçant,
dans leur obscurité, un vrai ministère envers les bien-aimés du Seigneur, leurs
noms ne sont pas restés dans la mémoire des hommes ; ils sont même effacés
de celle des chrétiens, mais « ils sont la gloire de Christ ». De tels frères
devaient recevoir devant les assemblées la preuve de l’amour des saints. Ils
accompagnaient Tite, heureux de rester dans l’ombre d’un serviteur de Dieu que
l’apôtre employait comme son délégué dans l’oeuvre, heureux en même temps
d’avoir toute l’approbation de Christ dans leur humble service.
Je voudrais encore présenter quelques pensées qui m’ont réjoui à
la lecture du chap. 9. Nous y trouvons les conséquences
de la fidélité
dans ce ministère de charité qui avait si peu d’apparence.
La première des conséquences se trouve au v. 6 : « Celui qui
sème chichement moissonnera aussi chichement, et celui qui sème libéralement
moissonnera aussi libéralement ». N’oublions pas cela. Si nous gardons pour nous-mêmes,
comme s’ils étaient à nous, les biens que Dieu a mis entre nos mains, nous ne
semons pas du tout, ou nous semons chichement. Mettre de côté tout ou partie de
son superflu, c’est, je n’en doute pas, semer chichement. Accumuler les biens
que Dieu met à notre disposition, c’est les détourner du but pour lequel Dieu
les a mis entre nos mains. Celui qui sème chichement ne peut s’attendre à des
bénédictions abondantes, même quant aux choses de la terre. Un économe prudent
est celui qui use largement des
biens qu’il considère, non comme étant à lui, mais à son Maître.
Une seconde conséquence de la fidélité dans le service
pécuniaire, se lit au v. 7 : « Que chacun fasse selon qu’il se l’est
proposé dans son coeur, non à regret, ou par contrainte, car Dieu aime celui
qui donne joyeusement ». Remarquez ce mot : « Dieu aime
». Non pas
qu’il n’aime tous ses enfants, mais là où se rencontre le désir joyeux de
servir le Seigneur dans ces biens de la terre, on est aimé de Dieu. Le Seigneur
dit à ses disciples : Si vous obéissez
, le Père vous aimera ; mais
nous trouvons ici : Dieu vous aime, si vous donnez
. Dans la
proportion où j’emploierai joyeusement les choses d’ici-bas pour le service de
Celui qui me les a confiées, j’aurai dans mon âme une jouissance spéciale de
l’amour et de l’approbation de Dieu.
Une troisième conséquence se voit aux v. 8-11 : « Mais Dieu est puissant pour faire abonder toute grâce envers vous, afin qu’ayant toujours en toutes choses tout ce qui suffit, vous abondiez pour toute bonne oeuvre, selon qu’il est écrit : « Il a répandu, il a donné aux pauvres, sa justice demeure éternellement. Or celui qui fournit de la semence au semeur et du pain à manger, fournira et multipliera votre semence, et augmentera les fruits de votre justice, étant de toute manière enrichis pour une entière libéralité, qui produit par nous des actions de grâces à Dieu ». Ici, Dieu fait abonder la grâce envers eux, pour qu’ils puissent abonder pour toute bonne oeuvre. Il honore les saints qui ont employé leurs biens pour Lui ; il augmente « les fruits de leur justice », les fruits qui sont la conséquence d’une marche juste et fidèle, de manière qu’ils puissent les répandre au-dehors avec une entière libéralité et sans aucune restriction.
Une quatrième conséquence est mentionnée aux v. 12 et 13 :
« L’administration de cette charge… abonde par beaucoup d’actions de
grâces
rendues à Dieu ; puisque,
par l’expérience qu’ils font de ce service, ils glorifient Dieu pour la
soumission dont vous faites profession à l’égard de l’évangile du Christ, et
pour la libéralité de vos dons envers eux et envers tous ». Ce n’est certes pas
peu de chose que des actions de grâces montent continuellement à Dieu à notre
sujet du fond des coeurs de tous les saints qui ont été secourus par
nous ! Ils rendent grâces ici pour deux choses : d’abord pour la
profession de leurs frères d’être soumis à l’évangile du Christ, profession
dont la réalité est prouvée par leur dévouement, ensuite pour la libéralité de
leurs dons qui ne s’adressent pas seulement aux nécessiteux dans cette
circonstance spéciale, mais coulent constamment vers tous.
On trouve enfin, au v. 14, une dernière conséquence de la
fidélité dans ce service : « les supplications qu’ils font pour vous
».
Quel privilège, pour le serviteur fidèle, d’être ainsi l’objet des
supplications des saints à son égard et de combien de dangers, de fautes
peut-être, il sera préservé, parce que l’intercession des saints, ranimée par
sa libéralité, monte continuellement pour lui devant le trône de la
grâce !
L’apôtre termine par ces mots : « Grâces à Dieu pour son don
inexprimable (v. 15). Nous avons vu la mesure la plus grande de la grâce envers
nous dans le fait que Christ a été pauvre, afin que par sa pauvreté nous
fussions enrichis ; nous voyons ici la mesure la plus grande de la
libéralité de Dieu à notre égard. Quel est ce don inexprimable ? C’est
la personne de Christ lui-même
!
Le chapitre que nous venons de lire présente un caractère du
ministère qu’il est important de considérer. On voit souvent un serviteur du
Seigneur qui a reçu un don spirituel de Sa part, exercer ce don indépendamment
de son état moral, en sorte que cet état se trouve ne plus correspondre à la
valeur de ce qui lui est confié. L’apôtre se montre ici personnellement au
niveau du ministère qu’il exerçait, et son état moral ne s’en séparait pas.
C’est ce qui donnait à ce service une telle valeur au milieu de ceux en faveur
desquels il l’exerçait. Sa personne et sa conduite étaient la reproduction de
ce qu’il prêchait. Sa parole
correspondait à ses actes, et l’état de son coeur correspondait à sa parole
. Il suivait en tout l’exemple de son
Maître. Quand les hommes demandaient à Jésus ce qu’il était, il
répondait : « Absolument ce qu’aussi je vous dis ». En contraste avec la
conduite de Paul, nous trouvons dans ce chapitre celle des faux apôtres et des
faux docteurs. Les Corinthiens venaient d’échapper, par le ministère de
l’apôtre dans sa première épître, aux entreprises de Satan pour détruire cette
assemblée de Dieu, en y introduisant l’esprit charnel, le manque de vigilance,
le mal et la corruption qui en sont la suite. L’épître ayant produit son effet,
les Corinthiens avaient été restaurés. La tristesse, la repentance, le zèle
pour juger le mal et s’en purifier, avaient été tels que l’apôtre pouvait leur
dire : « Je me glorifie de vous ». Il pourrait sembler qu’une assemblée,
délivrée aussi complètement, aurait dû l’être d’une manière définitive ;
mais, à la première victoire sur Satan remportée par vous, soyez certains que
l’Ennemi préparera une seconde attaque. Devant ce danger, les Corinthiens
paraissent n’avoir eu aucune appréhension, et cependant le mal était déjà là,
menaçant, et agissait sourdement au milieu d’eux, d’abord pour les séparer de
l’apôtre, ensuite pour les détruire eux-mêmes.
Devant ces dangers, nous avons à être sur nos gardes, à veiller
sans cesse, non seulement comme individus, mais comme assemblée. Dieu nous a
peut-être donné quelque victoire en nous délivrant de choses qui étaient des
entraves pour notre vie chrétienne. Ne nous endormons pas sur une victoire, car
Satan, notre Ennemi, ne dort pas. Il sait revêtir mille déguisements (11:14,
15) et, s’il n’a pas réussi à nous vaincre une première fois, il reviendra,
avec des séductions plus subtiles que les premières, afin de nous anéantir. En
parlant de ce danger aux Corinthiens, l’apôtre ne nomme pas même ces
adversaires ; il les appelle « des hommes », « un homme ». Il faut que ce soit
leur oeuvre
qui les démasque, mais de
plus, le danger qu’ils représentent est de tous les temps et ne se lie pas à un
nom particulier. Leur travail souterrain avait pour but de miner l’autorité des
apôtres, comme il a pour but aujourd’hui de miner l’autorité de cette Parole
qu’ils nous ont transmise. Ces gens cherchaient à déprécier la valeur personnelle
que les Corinthiens avaient jusqu’alors attribuée à Paul. Ils étaient assez
osés pour laisser penser que celui qui avait marché au milieu d’eux, ayant le
Christ pour modèle, et qui avait souffert pour l’Évangile, marchait « selon la
chair » (v. 2). Ils se gardaient bien de nier la valeur des lettres
inspirées : Ses lettres, disent-ils, « sont graves et fortes, mais sa
présence personnelle est faible et sa parole méprisable » (v. 10). Il a de
l’autorité quand il est loin, mais quand il est présent il n’en a aucune ;
voyez comme il est « chétif au milieu de vous ! » (v. 1). Plus loin, au v.
12, on trouve que ces « faux apôtres » et ces « ouvriers trompeurs » (11:13) — car,
en ce temps-là, beaucoup prenaient le titre d’apôtres au milieu des assemblées
— « se recommandaient eux-mêmes », plaçant leur propre autorité en regard de la
faiblesse apparente de Paul. Mais si Satan cherchait à annuler l’autorité du
serviteur de Dieu dans l’estime de ceux envers lesquels il exerçait son
ministère, c’était en fin de compte pour s’attaquer à Christ (11:4). En
apparence, cela pouvait être considéré comme une lutte d’homme à homme ;
en réalité, c’était la guerre de Satan contre le Seigneur lui-même. Ruinez
l’autorité de l’apôtre et non seulement vous entravez, mais vous perdez l’oeuvre
du Seigneur au milieu des chrétiens.
Au v. 1, Paul parle ainsi de lui-même : « Or moi-même, Paul,
je vous exhorte par la douceur et la débonnaireté du Christ, moi qui, présent,
quant à l’apparence suis chétif au milieu de vous, mais qui, absent, use de hardiesse
envers vous… » C’était exactement ce que ses adversaires disaient de
lui ; il l’accepte. Il avait usé de hardiesse quand il était absent ;
quand il était au milieu d’eux, il s’adressait à eux avec crainte et
tremblement ; cela était vrai. Et maintenant il les exhortait « par la
douceur et la débonnaireté du Christ
» : c’était ce qu’il voulait
montrer aux yeux de tous. Il avait appris à connaître le caractère du Seigneur
et le reproduisait au milieu des Corinthiens. Ce n’était pas la douceur et la
débonnaireté de Paul
, mais celles de Christ : la
douceur qui abandonne tous ses droits pour servir les autres, la débonnaireté
qui n’impute pas le mal, qui traverse ce monde avec un coeur simple, qui
cherche le bien partout et l’apporte dans tous ses rapports avec les hommes.
Mais quand il est loin, il dit : « Nous avons l’autorité ».
Au v. 8, il dit : « Le Seigneur nous l’a donnée pour l’édification
et non pas pour votre
destruction
». Aussi ne s’en
servait-il envers eux que quand il était loin, parce qu’il ne voulait pas les
détruire, mais les édifier. C’est pourquoi il avait, lors de sa première
lettre, renoncé à user de son autorité au milieu d’eux pour livrer le méchant à
Satan. Mais, quant aux adversaires, il dit : « Je vous supplie que, lorsque
je serai présent, je n’use pas de hardiesse avec cette assurance avec laquelle
je pense que je prendrai sur moi d’agir envers quelques-uns qui pensent que
nous marchons selon la chair » (v. 2). Il montre que, s’il ne réussit pas à
faire un effet sur ces hommes, il sera obligé de venir pour les détruire. Cette
arme, Dieu l’avait mise dans sa main ; il pouvait l’employer contre ces
faux apôtres, mais, s’il ne le faisait pas, c’était à cause des saints. Il
voulait d’abord que « leur obéissance fût rendue complète » par son autorité pour
l’édification. Après cela, il agirait avec hardiesse, ses armes étant
puissantes pour tirer vengeance de toute désobéissance (v. 3-6).
Au v. 12, il accuse ces hommes de « se comparer eux-mêmes à
eux-mêmes ». Quand il se compare aux
autres,
le chrétien, comme du reste tout autre homme, n’y acquiert qu’une
bonne opinion de lui-même. Quand il se compare à lui-même
, il se présente aux autres comme
étant en lui-même
un modèle, et c’est
le comble de l’orgueil
, car c’est supplanter Christ. Mais
il peut encore se comparer à Christ.
Quand
cela a lieu, il atteint immédiatement les dernières couches de l’humiliation,
car, comment avoir une pensée élevée de soi-même quand on se place devant
Dieu ? C’était ce que faisait l’apôtre, et de telle manière que son caractère
se fondait dans celui de Christ, pour exhorter les autres ; il se cachait
derrière son Maître. Souvenons-nous-en. Chaque fois que nous sommes en présence
de Christ nous sommes vraiment humbles, mais nous ne sommes humbles d’une
manière habituelle
que si nous nous
plaçons habituellement
en Sa
présence. Il peut m’arriver de me juger sévèrement au moment où je me trouve
là, et d’avoir, le moment d’après, une bonne opinion de moi-même pour avoir
quitté un instant cette présence. On ne trouvait pas cela chez l’apôtre, parce
qu’il était continuellement « manifesté à Dieu ». À la fin de cette épître, il
dit : « Je ne suis rien » (12:11). Pensait-il réellement ce qu’il
disait ? Oui, parce que ce qu’il disait était exactement ce qu’il était.
Il avait tellement disparu à ses propres yeux que, quand il voulait parler de
lui-même, il ne se retrouvait pas. Il dit . « Je connais un homme en
Christ » ; il n’avait pas de nom. Cependant, ce même homme en Christ,
obligé de reprendre son service dans ce monde, après être monté au troisième
ciel, est en danger de s’enorgueillir et de penser à lui-même, car le danger
est toujours là. Mais le Seigneur, dans son amour, lui envoie un ange de Satan
pour le souffleter, afin qu’il reste dans la position d’oubli de lui-même où la
grâce l’a placé.
À la fin du chapitre, nous trouvons ces mots : « Mais que
celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur » (v. 17). L’apôtre dit à
deux reprises : « Je me glorifie de
vous ». Il avait montré combien il
estimait ce que Dieu, dans sa grâce, avait produit dans leurs coeurs, mais il
ne se glorifiait pas en
eux. S’il
s’agissait de lui-même, il disait : « S’il faut se glorifier, je me
glorifierai dans ce qui est de mon infirmité » (11:30). Là
, en effet, il
m’est permis de me glorifier. Quand celui qui venait d’être consacré apôtre des
gentils était dévalé, dans une corbeille, par une fenêtre, à travers le mur de
Damas, il lui seyait bien de se glorifier ; il en était de même quand,
depuis le début de sa carrière, il n’avait cessé d’être souffleté par un ange
de Satan. — « Ce n’est pas », ajoute-t-il, « celui qui se recommande lui-même
(comme ces faux apôtres) qui est approuvé, mais celui que le Seigneur
recommande » (v. 18). C’est ce que nous aussi, nous avons à chercher, comme
l’apôtre, dans toute notre vie chrétienne. Ne parlons pas de nous-mêmes ;
ne nous attribuons aucune importance quelconque. Le Seigneur recommande celui
qu’il approuve. Quand ses serviteurs sont vraiment humbles, il a soin de leur
ménager une place d’honneur, et une influence bénie sur d’autres, à la gloire
de Christ.
Nous avons vu que Paul ne se glorifiait que dans son infirmité,
en opposition aux faux apôtres qui cherchaient à détruire son influence pour
établir la leur. Mais, quand il est forcé de parler de lui-même, il dit :
« Je parle comme un homme hors de sens ». Appelez-moi un insensé, si je viens
vous parler de mes mérites. Je suis obligé
de parler ainsi pour
m’opposer à ceux qui voudraient vous détourner de la foi en accaparant votre
confiance. Or ces faux docteurs, que présentaient-ils aux Corinthiens ?
Ils se présentaient eux-mêmes
. On voit ici la différence entre le
ministère selon Dieu et le ministère selon l’homme. De fait, le ministère
humain n’a jamais d’autre résultat
(nous nous gardons bien de
dire : d’autre but
) que de mettre l’homme en avant, tandis que le
ministère qui a sa source en Dieu n’a pas autre chose à présenter que Christ.
En considérant ce qui est dit ici de ces faux apôtres, vous serez frappés de
voir combien ces hommes, dont Paul tait ici les noms à dessein, réussissaient à
prendre de l’influence sur l’esprit des Corinthiens. Ils venaient leur annoncer
des choses qui étaient l’opposé de ce que l’apôtre leur avait prêché, et les
Corinthiens qui étaient encore charnels, les laissaient faire. Vous trouvez, au
v. 4, quel danger les menaçait : « Si celui qui vient prêche un autre Jésus
que nous n’avons pas prêché, ou que vous receviez un Esprit différent que vous
n’avez pas reçu, ou un Évangile différent que vous n’avez pas reçu vous
pourriez bien le supporter ». Ces trois principes fondamentaux, sans lesquels,
de fait, il n’y a point de christianisme, étaient en danger : la personne
de Christ, l’Esprit de Christ, l’Évangile de Christ. Les yeux de ces croyants,
dont beaucoup étaient sincères, étaient assez obscurcis pour ne pas voir que le
travail de ces hommes venait saper les fondements mêmes de leur foi et les
préparait peu à peu à supporter de fausses doctrines. On voit l’influence
délétère qu’un faux enseignement, qui n’est pas celui de l’Esprit Saint, peut
exercer sur des chrétiens qui sont engagés dans ce chemin. Il dit au v.
20 : « Si quelqu’un vous asservit, si quelqu’un vous dévore, si quelqu’un
prend votre bien, si quelqu’un s’élève, si quelqu’un vous frappe au visage,
vous le supportez ». Quand on est sur cette pente, on supporte tout de la part
de ceux qui se recommandent eux-mêmes et, se mesurant eux-mêmes par eux-mêmes,
réussissent à s’introduire au milieu des enfants de Dieu ; on accepte tout
ce que ces gens imposent à leurs adhérents, tous les fardeaux dont ils les
chargent, plutôt que de recevoir le sain enseignement apporté par un
apôtre ! Paul faisait exactement le contraire. Il possédait une autorité
de la part de Dieu pour venir frapper, au milieu des Corinthiens, tous ceux qui
s’opposaient à lui ; aussi a-t-il le droit de dire : Si je reviens je
serai peut-être obligé d’agir ainsi. Cependant on peut remarquer, en lisant ces
chapitres, que l’apôtre n’a pas songé un instant à venir opposer son autorité à
celle de ces « ouvriers trompeurs ». C’est que, comme nous l’avons dit plus haut,
dans sa pensée, toute l’autorité que le Seigneur avait mise entre ses mains
avait pour but l’édification
de
l’Assemblée de Christ.
Maintenant, si nous entrons un peu dans le caractère du
ministère de Paul, tel que ce chap. 11 nous le présente, nous voyons qu’il n’a,
tout du long, qu’une pensée : présenter Christ, comme seul moyen de les
détourner du mal et de les attacher aux choses excellentes. Il le
représentait
dans sa personne
. C’est une chose très belle que
l’enseignement, mais une chose plus belle encore, de porter dans sa
personne : « la douceur et la débonnaireté de Christ ». Les âmes sont
souvent beaucoup plus attirées vers le Seigneur par les caractères qu’elles
constatent chez les serviteurs de Christ que par tout ce qu’elles peuvent
entendre de leur bouche.
Vous trouvez cela en premier lieu, au v. 2 de ce chapitre : Paul était jaloux à leur égard « d’une jalousie de Dieu » ; il n’avait pas du tout une jalousie humaine à l’égard des Corinthiens en cherchant à en faire ses disciples. Les faux apôtres n’avaient que cela, eux qui voulaient les gagner à leur propre cause. « Car je vous ai fiancés », dit-il, « à un seul mari, pour vous présenter au Christ comme une vierge chaste ». N’est-ce pas exactement ce que nous trouvons au chap. 5 de l’épître aux Éphésiens ? Jésus n’avait pas fait autre chose : il s’était donné lui-même pour l’Assemblée, afin qu’il se la « présentât… glorieuse, n’ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable, mais afin qu’elle fût sainte et irréprochable ». Tel était le but du Seigneur en se donnant lui-même. L’apôtre dit : Je n’ai pas voulu faire autre chose que Lui ; aucun autre but que le sien, ne m’anime ; je désire vous présenter à Lui comme une vierge chaste. C’est ainsi qu’il veut vous avoir, et comment aurais-je un autre but que le sien ?
Il dit un peu plus loin : « Nous avons été manifestés de toute manière, en toutes choses, envers vous » (v. 6). Il avait plu au Seigneur de se manifester à Saul de Tarse, quand la lumière divine avait resplendi dans les ténèbres de son coeur. Mais, ayant reçu cette manifestation de Christ, il n’a pas d’autre pensée que de le manifester lui-même au-dehors. Aussi peut-il dire : « Nous avons été manifestés de toute manière, en toutes choses, envers vous ». Il apportait la lumière de cette présence, et par son moyen les hommes se trouvaient placés dans la pleine lumière de Christ. Nous n’avons pas à agir autrement, soit comme individus, soit comme assemblée. On le voit dans la première épître aux Corinthiens. Certes, il y avait, dans cette assemblée, beaucoup à reprendre, mais si un homme du dehors se trouvait là, les secrets de son coeur étaient rendus manifestes, et, placé en pleine lumière, il publiait que Dieu était réellement parmi eux. Comme individus, nous pouvons aussi agir de même. Il faut que Christ habite par la foi dans nos coeurs, en sorte que chacun le voie en nous et dise : J’ai eu affaire avec Christ ; j’ai trouvé Celui qui est lumière, dans cet humble chrétien qui venait me parler, et cela m’a attaché à Jésus seul !
Au v. 10, vous trouvez un autre caractère de Christ, tel qu’il
est représenté par l’apôtre. Avez-vous remarqué cette expression : « Comme
la vérité de Christ
est en
moi » ? La Parole nous apprend que c’est Christ qui est la vérité. « Je suis
la vérité », dit le Seigneur. Il a manifesté parfaitement la vérité,
c’est-à-dire toute la pensée de Dieu
devant
les hommes, mais cette même pensée de Dieu était manifestée maintenant par
l’apôtre, parce que « la vérité de Christ était en lui
». Celui qui
était la vérité pouvait être connu dans la personne de Paul, le bien-aimé
serviteur de Dieu, et les âmes qui se trouvaient en relation avec lui,
pouvaient dire : « C’est par Paul que nous avons reçu la vérité ».
Au v. 11, il dit : « Est-ce parce que je ne vous aime
pas ? Dieu le sait ». Le
caractère suprême de Christ est l’amour. L’apôtre peut dire : Dieu sait si
cet amour est en moi. Je ne regarde pas aux hommes, pour voir s’ils s’en
rendent compte, mais Dieu le sait. Il a dit auparavant : « L’amour du Christ
nous étreint ». L’amour du Christ ! Il en était donc le porteur auprès de
tous les hommes, comme auprès des saints. Dieu sait si je vous aime, de l’amour
de Celui qui s’est révélé à moi comme le Dieu d’amour, et c’est cet amour que
j’ai apporté au milieu de vous. Voilà pourquoi je n’ai pas voulu vous être à
charge, pourquoi aussi vous ne m’avez pas vu venir parmi vous, muni de mon
autorité.
Après avoir présenté ces choses, l’apôtre répond aux faux
docteurs qui venaient au milieu des saints, déguisés en anges de lumière, car
il ne faut pas oublier que c’est aux doctrines séductrices que Satan sait
donner la plus belle apparence. De nos jours, quand on parle aux chrétiens d’un
faux docteur, la plupart d’entre eux vous répondent : « Mais cet homme est un véritable saint dans sa conduite
! »
L’apparence est celle d’un ange de lumière, et pourtant le caractère est celui
du serpent qui a séduit Ève par sa ruse !
Après avoir répondu à toutes les prétentions de ces gens-là, l’apôtre est contraint de parler de ce qu’il a souffert pour Christ : « Puisque plusieurs se glorifient selon la chair, moi aussi je me glorifierai » (v. 18). Toute cette description (v. 23-31) nous montre combien peu le livre des Actes nous énumère les circonstances traversées par l’apôtre Paul. Dans toute cette énumération, vous rencontrez peut-être trois faits relatés dans les Actes. Tout le reste y est passé sous silence, mais le Seigneur ne l’a pas oublié, et si l’apôtre mentionne toutes ces tribulations, c’est en se réjouissant d’avoir été estimé digne de souffrir des opprobres pour le nom de Christ. Quant à ses circonstances, ce cher serviteur pouvait bien dire ici, comme dans sa première épître : « Si, pour cette vie seulement, nous avons espérance en Christ, nous sommes plus misérables que tous les hommes » (1 Cor. 15:19). Le plus misérable, mais le plus heureux aussi, parce que son espérance était en Christ seul et que pour lui, vivre ici-bas, c’était Christ. Ces souffrances de Paul n’étaient pas une discipline de Dieu à son égard. Il avait apporté Christ au monde, et voilà ce que le monde avait su lui offrir en échange. Mais il ne se plaignait pas, puisque ainsi il avait part aux souffrances de Christ. Ce qui ajoutait à ses souffrances, en l’assiégeant tous les jours, c’était la sollicitude pour toutes les assemblées. Il complétait ainsi les souffrances de Christ pour Son corps qui est l’Église.
Après avoir mentionné toutes ces tribulations, il ajoute : « S’il faut se glorifier, je me glorifierai dans ce qui est de mon infirmité », et il développe cette pensée à la fin de notre chapitre et dans le chapitre suivant. Dès le commencement de son ministère, la persécution s’était élevée contre lui. Il s’était trouvé à Damas dans une position que le monde aurait pu tourner en ridicule et il s’en glorifie. C’est ainsi, semble-t-il dire, que Dieu m’a fait descendre. Et cet homme, descendu si bas, est élevé dans le troisième ciel pour entendre les paroles ineffables ! Dieu dit : Je t’ai abaissé ; maintenant je t’élève. Mais il faut redescendre encore du troisième ciel. Il semble qu’il va vivre désormais avec le souvenir glorieux d’être monté dans le paradis pour y entendre Christ. Non ; un ange de Satan le soufflette, et l’abaisse jusqu’au niveau de Job, le patriarche. Le Seigneur lui dit alors : Je veux que tu ne te glorifies que dans tes infirmités ; c’est là que ma puissance se développe et je veux faire de toi un vase de ma puissance.
Apprenons nous-mêmes par l’exemple de l’apôtre à ne nous glorifier en rien, sinon dans nos infirmités. Le Seigneur n’emploie que des vases brisés pour faire son oeuvre dans ce monde, et pour être en bénédiction à l’assemblée de Christ.
Nous avons vu au chapitre 10 que tout ministre de Christ doit
mettre son état moral d’accord avec le don que le Seigneur lui a confié, et
qu’il doit être personnellement son représentant dans ce monde. C’est ce que
l’apôtre réalisait fidèlement dans son service. Dans le chapitre que nous
venons de lire, deux autres points importants sont développés : En quoi consiste la puissance du
ministère, et où faut-il en chercher la source ?
Voyons d’abord le deuxième point, la source du ministère, car
c’est par cela que l’apôtre commence. Si l’on considère le ministère à la
manière des hommes, on voit la différence immense entre leur conception et
celle du ministère selon Dieu. Les hommes, beaucoup de chrétiens même, pensent
qu’en acquérant une certaine science humaine, mise à la portée de tous dans les
écoles, ils pourront devenir des ministres de Christ, ou du moins développer le
don que Dieu leur a confié. En cela ils se trompent. La source du ministère ne
peut être trouvée que dans le nouvel
homme
; elle n’a rien à faire avec tout ce que le vieil homme peut
acquérir. L’apôtre développe ici cette vérité. Quant à son état avant sa
conversion, et notez bien que sa « grande science » datait d’alors, il n’en était
plus question pour lui ; il ne se considérait plus comme étant dans le
premier Adam ; aussi, parlant de lui-même, il dit : « Je connais un homme en Christ
». C’est dans le nouvel homme que son
ministère a pris sa source, et non dans tout ce que Saul de Tarse avait appris
aux pieds de Gamaliel. Pour exercer efficacement un ministère selon Dieu, il
faut avoir jeté par-dessus bord tout ce que l’homme voudrait y ajouter. Dès le
début, Saul apprit cela sur le chemin de Damas. Son vieil homme était fini,
jugé, réduit en poussière, et le point de départ de l’apôtre est la ruine
complète du premier Adam pour entrer, en Christ, dans une vie toute nouvelle.
Il avait appris cela en un instant
; nous ne l’apprenons souvent qu’à la
longue et difficilement. C’est aussi ce qui fait que parfois, quand nous
rencontrons quelque bénédiction dans notre ministère, nous en attribuons
volontiers quelque chose à nos facultés naturelles. Souvent nous perdons ainsi
les bénédictions qui s’attachent au service du Seigneur. On ne trouvait rien de
semblable chez l’apôtre ; il savait que la croix de Christ était le seul
endroit où il pouvait placer la chair avec tous ses avantages. Aussi ne se
glorifiait-il que du nouvel homme, d’être en Christ, et de n’avoir place nulle
autre part.
Il y avait quatorze ans que Paul avait entrepris son premier
voyage, et c’était peut-être à Antioche que les choses extraordinaires dont il
parle ici, lui étaient arrivées. Pour l’encourager dans son ministère où il
allait rencontrer tant de souffrances, Dieu le ravit au troisième ciel et lui
fait entendre là des choses ineffables. Il était de toute importance que
l’apôtre soit mis en présence de l’excellence de Christ dans le troisième ciel,
pour que, redescendu sur la terre, il soit bien convaincu qu’il valait la peine
d’endurer pour Lui les plus grandes souffrances. Quel lieu que le troisième
ciel, pour y être transporté ! Le tabernacle modèle des choses célestes
que Dieu montra à Moïse sur la montagne, était divisé en trois : le
parvis, le lieu saint et le lieu très saint. C’étaient des types de choses qui
étaient en dehors et au-dessus de la terre. D’abord le parvis où se trouvait
l’autel d’airain, image de la croix, dans un sens au-dessus de la terre, et dont
Jésus dit : Quand je serai « élevé
de la terre
, j’attirerai
tous les hommes à moi ». Le monde a déclaré là qu’il n’y avait pas de place
ici-bas, même pour les pieds du Sauveur. On peut donc dire que la première
partie du tabernacle sort de la limite des choses terrestres, comme symbole.
C’est le point qui déjà nous sépare du monde. Du parvis on entrait dans le lieu
saint où l’on trouvait la table des pains de proposition, le chandelier et
l’autel d’or. En type, nous sommes dans le lieu saint, présentés à Dieu en
Christ, capables de rendre culte, illuminés du Saint Esprit. Ensuite, vient le
lieu très saint, type du troisième ciel. On y trouvait l’arche et le trône de
Dieu sur le propitiatoire. Dans le troisième ciel nous pouvons entrer par
l’Esprit, à travers le voile déchiré, car nous y trouvons le trône de la grâce.
Mais l’apôtre y avait été ravi en
réalité,
sans cependant pouvoir dire comment, et il y avait entendu des
choses incommunicables à d’autres. Il ne nous est pas donné d’y entrer ainsi,
car nous n’avons pas reçu comme lui un ministère inspiré pour présenter aux
hommes les mystères de Dieu. Mais il y a pour le chrétien un lieu plus intime
que celui du trône, c’est la
maison du Père. Si nous n’avons pas la perfection de révélations que l’apôtre seul
a eues, Dieu nous a ouvert
l’endroit caché de son tabernacle, c’est là que nous pouvons méditer sur la
présence ravissante de Christ qui nous a révélé le Père. Nous n’y entendons pas
les choses ineffables, mais nos âmes y jouissent de la communion avec le Père et
avec son Fils Jésus Christ. Quand nous serons là corporellement ce sera bien
différent, sans doute, car nous serons en tout point et pour toujours,
semblables à Lui dans la gloire ; mais maintenant déjà nous pouvons jouir
de ce lieu béni.
Quand l’apôtre parle, comme nous l’avons vu, d’être en Christ il
dit : « Je me glorifierai d’un tel homme
, mais je ne me glorifierai pas de moi-même
, si ce n’est dans mes infirmités » (v. 5). Il fait donc une
différence entre un tel homme et lui-même. Il sait très bien ce qui serait
arrivé, si descendant du troisième ciel, il avait été livré à lui-même, car il
se serait glorifié d’y avoir été. Le danger, pour lui, n’était pas d’être au
troisième ciel, mais d’en des
cendre
. Tant qu’il était là-haut, il
gardait absolument sa place, mais quand il redescend sur la terre,
l’extraordinaire des révélations aurait pu le remplir d’orgueil. Afin de le
garder de se glorifier, Dieu lui envoie un ange de Satan pour le souffleter, de
sorte qu’il pouvait devenir un objet de mépris ou de dégoût pour ceux auxquels
il s’adressait. Aussi les faux apôtres disaient de lui : « Sa personne est méprisable
».
Quand il parle aux Galates, il leur dit : « Vous savez que dans l’infirmité
de la chair je vous ai évangélisés au commencement ; et vous n’avez point méprisé
,
ni rejeté avec dégoût ma tentation qui était en ma chair » (4:13, 14). Satan
devient ainsi, comme pour Job, le moyen de bénédiction pour l’apôtre. Loin
d’être détourné du chemin de la dépendance, il suit les traces de son Sauveur à
Gethsémané. Jésus avait prié trois fois
que la coupe passe loin de Lui,
Paul supplie trois fois
le Seigneur que l’épreuve se retire de lui. Une
fois encore Satan s’était trompé. Il espérait rendre l’Évangile méprisable dans
la personne de son ministre, mais Dieu dit : « Ma grâce te suffit, car ma
puissance s’accomplit dans l’infirmité ».
C’est ici que nous trouvons la réponse à notre seconde
question : En quoi consiste la puissance
du ministère ? Dieu dit : Il faut que tu sois sans
force en toi-même pour que ma
puissance se développe en toi. Ce passage est vrai pour nous tous. Nous ne
trouvons de puissance dans notre service que si nous ne sommes rien à nos yeux.
C’est en effet ce que dit Paul au v. 11 : « Je n’ai été en rien moindre que
les plus excellents apôtres, quoique
je ne sois rien
». Je me demande si quelqu’un d’entre nous pourrait dire de
lui-même, en toute sincérité : « Je ne suis rien ». Certains hommes de Dieu
l’ont montré d’une manière remarquable dans la pratique. Quand on demandait à
Jean le Baptiseur qui il était, il répondait : « Voix
de Celui qui
crie dans le désert ». Dieu parle par ma voix, mais je ne suis rien. Arrivent
les infirmités. Ah ! dit Paul, aussi bien que je me glorifie d’un homme en
Christ, je me glorifie dans mes infirmités, afin que la puissance de Christ
demeure sur moi
. J’accepte les soufflets de l’ange de Satan, je consens à
n’être rien, je ne recule pas devant la souffrance, pour-vu seulement que cette
puissance ne m’abandonne pas. « Mon millier, dit Gédéon, est le plus pauvre en
Manassé, et moi je suis le plus petit dans la maison de mon père » ; alors
une parole de l’ange lui communique la force. Si, d’un autre côté, comme
Samson, l’on se confie en sa force, on devient une proie facile de l’Ennemi. Il
peut en être ainsi pour nous. Lorsque, perdant le sentiment de notre faiblesse
et de notre néant, nous mettons notre confiance en nous-mêmes ou dans les dons
que Dieu nous a départis, la puissance nous a quittés sans que, peut-être,
comme Samson, nous en sachions rien ; et la bénédiction ne se retrouve
pas. Aussi l’apôtre dit : « C’est pourquoi je prends plaisir dans les
infirmités, dans les outrages, dans les nécessités, dans les persécutions, dans
les détresses pour Christ : car quand
je suis faible, alors je suis fort
»
(v. 10). Il ne dit pas : Je les supporte, je les accepte ; il
y prend plai
sir
; son bonheur est de souffrir
en vue du but à atteindre, et parce que dans la faiblesse est le secret de la
puissance de son ministère.
Au commencement de ce chapitre, nous avons vu un homme en Christ et la puissance manifestée dans son ministère ; nous trouvons à la fin (v. 20, 21), non plus les fruits de l’Esprit dans le coeur du racheté, mais les fruits de la chair, fruits tels qu’ils font monter la rougeur à nos fronts : « Car je crains que, quand j’arriverai, je ne vous trouve pas tels que je voudrais, et que moi je ne sois trouvé par vous tel que vous ne voudriez pas, et qu’il n’y ait des querelles, des jalousies, des colères, des intrigues, des médisances, des insinuations, des enflures d’orgueil, des désordres, et qu’étant de nouveau revenu au milieu de vous, mon Dieu ne m’humilie quant à vous, et que je ne sois affligé à l’occasion de plusieurs de ceux qui ont péché auparavant et qui ne se sont pas repentis de l’impureté, et de la fornication, et de l’impudicité qu’ils ont commises ».
Les Corinthiens, doués comme ils l’étaient, avaient marché selon
la chair, et ce n’était pas seulement un individu, « le méchant » parmi eux qui
avait péché ; beaucoup d’entre eux avaient fait des choses semblables,
puis étaient revenus en apparence de leurs errements, sans que leurs
consciences aient été atteintes et que la repentance se soit produite dans
leurs coeurs. Comme tout cela est sérieux ! Il nous est possible de vivre
dans la puissance du nouvel homme ; mais, d’autre part, nous pouvons
suivre le chemin de la chair et marcher avec les enfants de Dieu, en affligeant
ceux qui ont à coeur la gloire de leur Sauveur. Ayons soin de bannir de notre
vie tout ce qui ne correspond pas au caractère de Christ, afin que notre conduite
le glorifie. Que le désir de nos coeurs à tous
soit de vivre selon le
nouvel homme et dans sa puissance !
En repassant tout ce que cette épître nous a enseigné au sujet
du ministère apostolique et du ministère chrétien, je suis frappé de voir que
l’autorité du ministère pour châtier, pour ne pas épargner celui qui s’élève
contre Christ, ne vient qu’en dernier lieu. En effet, l’apôtre a présenté dans
le courant de cet écrit ce qu’est le ministère chrétien comme ministère de
l’Esprit, de la grâce et de la liberté. Il a montré ensuite ce ministère à
l’oeuvre, soit envers le monde, soit envers l’Assemblée qu’il exhorte à marcher
dans la sainteté pratique. Puis il a montré ce ministère, s’occupant des plus
humbles fonctions, du bien matériel
des
enfants de Dieu, et ne s’épargnant aucune fatigue pour apporter du secours à
ceux qui sont dans le besoin. Il a présenté ensuite ce ministère, dans sa
propre personne, reproduisant les caractères même de Christ aux yeux de tous,
et trouvant sa source et sa puissance en Lui. Il arrive enfin, dans le dernier
chapitre, à un sujet que tout autre que l’apôtre aurait mis au premier plan
pour faire montre de l’autorité qui était entre ses mains. Vous avez vu dans
les chapitres précédents que le ministère de Paul rencontrait beaucoup
d’obstacles même parmi ses enfants dans la foi, que bien des misères
subsistaient encore dans l’assemblée de Corinthe, quand même en beaucoup de
choses leurs consciences avaient parlé et qu’ils avaient jugé et réparé le mal.
Mais, outre cela, de faux apôtres prétendaient faire recevoir leur autorité
parmi eux en combattant celle de Paul. Devant tous ces obstacles, il est
remarquable qu’il ne parle pas une fois, dans les chapitres qui précèdent, de
vouloir exercer son autorité en châtiment. Au chap. 10:8, il dit : « Si
même je me glorifiais un peu plus de notre autorité que le Seigneur nous a
donnée pour l’édification et non pas pour
votre destruction,
je ne serais pas confus ». Il a soin de dire que cette
autorité n’a pas pour but de frapper et de détruire. Au v. 10 de notre
chapitre, il dit exactement la même chose : « Selon l’autorité que le
Seigneur m’a donnée pour l’édification et non pas pour la destruction ». Ainsi
le premier
caractère de l’autorité
que l’apôtre avait reçue du Seigneur n’était pas « d’user de sévérité », mais
bien d’édifier, quand même il avait le « droit
» de châtier. Il en est de
même dans l’épître aux Éphésiens (2:20), où l’autorité avait été confiée aux
apôtres et prophètes pour l’édification
de la maison de Dieu.
Dans ce même chap. 10:3, une autre fonction de cette autorité
était de détruire, non les récalcitrants, mais les forteresses
élevées par Satan pour empêcher les âmes de prendre
possession de leurs privilèges. Cette autorité, Paul pouvait se réjouir de la
posséder et d’amener ainsi les âmes captives à l’obéissance de Christ. En
effet, pendant tout son ministère, son combat était continuellement avec ce qui
s’opposait à cette connaissance, que ce fût la religion des Juifs ou la sagesse
des gentils.
Mais ce même chap. 10:6 nous dit encore : « Étant prêts à tirer vengeance
de toute désobéissance,
après que votre obéissance aura été rendue complète ». Leur obéissance était le
premier but, mais ce but atteint, les ouvriers de Satan qui avaient cherché à
s’opposer à l’oeuvre de Dieu parmi les Corinthiens, seraient frappés par la
verge d’autorité dans la main de l’apôtre, comme jadis les Égyptiens par la
verge de Moïse. S’il parle ainsi, c’est donc à la fin de son épître. Aussi
dit-il dans notre chapitre : « Si je viens encore une fois, je n’épargnerai pas
» (v. 2) ; j’userai « de sévérité
»
(v. 10). Dans la première épître aux Corinthiens, il avait décidé de
livrer le méchant à Satan, afin qu’il soit sauvé comme à travers le feu, mais
il avait suspendu son jugement, et l’on voit dans la seconde épître que c’était
pour produire dans leurs coeurs un jugement complet du mal. Dans la première
épître à Timothée (1:19), il livre de fait Hyménée et Alexandre à Satan, afin
qu’ils apprennent à ne pas blasphémer. Ici, il est décidé
à frapper, mais combien à contrecoeur !
On voit, au v. 3, que les adversaires de l’apôtre essayaient d’amener les Corinthiens à mettre en doute si Christ parlait réellement par son moyen. Une pareille audace est difficile à comprendre, mais qu’est-ce que Satan n’osera pas dans sa guerre contre Christ ? L’apôtre leur donne la justification péremptoire de sa mission divine : « Examinez-vous vous-mêmes, et voyez si vous êtes dans la foi ; éprouvez-vous vous-mêmes. Ne reconnaissez-vous pas à l’égard de vous-mêmes que Jésus Christ est en vous ? » Si Christ était en eux, ils avaient l’Esprit de Dieu. Comment cette bénédiction leur avait-elle été communiquée ? Par le ministère de Paul qui avait été le moyen de les amener, par la foi, à cette position bénie. Il ajoute : « À moins que vous ne soyez des réprouvés ». Il prend l’image d’un creuset dans lequel on ne trouve que des scories au lieu de métal précieux. Si Christ, le métal précieux, était en eux, pouvaient-ils être des réprouvés ? S’il agissait par Paul pour les amener à Dieu, est-ce que Paul pouvait être réprouvé ? Mais quelle tendresse on découvre à leur égard dans le coeur de l’apôtre ! Je consens, dit-il, à être comme réprouvé, à ce que vous ne trouviez en moi aucune valeur quelconque, pourvu que vous fassiez ce qui est bon. Je suis heureux d’être entièrement mis de côté, pourvu que vous soyez dans le bon chemin et que vous fassiez ce qui est agréable à Dieu !
Il termine enfin cette belle épître, au v. 11, en les exhortant,
comme Assemblée, à faire cinq choses : 1° Réjouissez-vous. Quelle barrière
la joie chrétienne oppose à tout ce par quoi Satan cherche à mécontenter nos
âmes ! 2° Perfectionnez-vous.
Il demandait déjà leur perfectionnement au v. 9. Cette image est prise d’un
objet qu’il s’agit de faire fonctionner convenablement. De nos jours, une
montre en est le meilleur exemple. Elle peut être bien agencée, sans aucune
pièce qui lui manque, et pourtant il y manque quelque chose : elle ne
marche pas. Il faut donc en retenir chaque pièce, en sorte que le mouvement arrive
à s’opérer avec exactitude. C’est ce que nous avons à faire, aussi bien dans
l’Assemblée qu’individuellement. Nous avons à travailler à ce que chaque rouage
fonctionne selon un ordre que Dieu puisse approuver. Ce mot :
perfectionnez-vous ! ne parle-t-il pas à nos consciences ? Chacun de
nous est appelé à s’examiner en particulier et à se demander : Est-ce moi,
peut-être, qui entrave le fonctionnement de l’Assemblée à la satisfaction de
Christ ? 3° « Soyez consolés (ou encouragés) ». Chose importante dans la vie
chrétienne : rien ne nous encourage davantage qu’une bonne conscience et
le sentiment que Dieu approuve notre marche. 4° « Ayez un même sentiment ». Qu’il
n’y ait pas, parmi les enfants de Dieu, de sentiments opposés les uns aux
autres, et qu’en toutes choses ils marchent dans un même sentier. 5° « Vivez en
paix ». La joie, la paix, une même pensée, sont aussi dans l’épître aux
Philippiens les éléments d’un bon état de l’Assemblée. « Et le Dieu d’amour et
de paix sera avec vous ». Dieu aime à se tenir dans la compagnie de ceux qui
réalisent ces cinq choses. Il est appelé le Dieu d’amour
et de paix.
Ce
n’est pas seulement comme en Philippiens : « Faites ces choses, et le Dieu de paix
sera avec vous ». Il se trouve
avec ceux qui cherchent la paix, car c’est son caractère ; mais ici, il
est aussi le Dieu d’amour
. Si cet état n’était guère celui des
Corinthiens, l’apôtre le désirait pour eux. Suivons-nous aussi ces cinq
préceptes ? le Dieu de paix viendra faire sa demeure au milieu de nous et
le Dieu d’amour nous fera pénétrer toujours plus dans les secrets de son propre
coeur !
« Saluez-vous l’un l’autre par un saint baiser ». C’est le
témoignage de l’amour mutuel
que Paul
désire voir parmi les chrétiens. L’épître se termine par ces mots : « Que
la grâce du Seigneur Jésus Christ, et l’amour de Dieu, et la communion du Saint
Esprit soient avec vous tous ! » Le Seigneur Jésus Christ, Dieu, le Saint
Esprit, la plénitude de la Trinité ! Le Seigneur Jésus Christ, dans la
manifestation de sa grâce, c’est-à-dire d’un amour descendu au milieu de la
scène du péché pour y apporter le remède souverain ; Dieu, dans
l’expression de son amour en Christ ; le Saint Esprit, par lequel nous
avons communion avec le Père et le Fils, et les uns avec les autres ! Quel
tableau délicieux d’une Assemblée selon Dieu ! L’apôtre désirait que ces
choses fussent avec eux tous,
non pas
avec quelques-uns seulement.
Bien-aimés, soit que nous soyons nombreux, ou seulement deux ou
trois pour représenter l’Assemblée dans ce monde, le désir de l’apôtre est que
ces choses soient avec nous tous
. S’il en avait été ainsi, quel autre
aspect l’Assemblée de Corinthe aurait présenté ! Reprenons pour nous-mêmes
chacun de ces préceptes ; méditons-les, et soyons certains que si nous
cherchons à réaliser ces choses individuellement et collectivement, des
bénédictions spéciales nous seront accordées. Au lieu d’une marche de faiblesse
et de désunion, d’insouciance et de sommeil, la vie de l’Assemblée s’épanouira
de manière que le monde lui-même rende ce témoignage : « Dieu est
réellement au milieu d’eux. Le Dieu d’amour et de paix est avec eux ! »